Fiscolâtrie
La Libre Belgique
vient de faire encore très fort dans sa sainte quête de l’électorat de gauche en publiant coup sur coup ("coût sur coût" conviendrait mieux) deux articles signés Patrick Van Campenhout (le second étant cosigné par un certain V. R.) constituant autant de vibrants dithyrambes envers l’Etat fiscal actif. Une manière de rappeler chaque Belge à ce prétendu "devoir" que de bons esprits orwelliens ont cru intelligent de nommer le "consentement à l’impôt" (l’un des oxymorons les plus ineptes qui fussent).Dans le premier papier, sobrement intitulé "Le Belge ne paie pas trop d'impôts", le journaliste essaye de prévenir l’apparition de vilains réflexes poujado-capitalistes chez le cochon de contribuable en lui versant une tisane pleine de miel, afin de lui faire oublier que le fisc sert généralement à faire boire la tasse aux assujettis à l’impôt. Il argue en particulier que pas mal de monde ne paie pas d’impôts, sous-entendant "de quoi faut-il alors se plaindre ?". Or le problème se pose de la manière suivante : étant donné le nombre croissant de fonctionnaires, d’associations lucratives sans but, et d'allocataires divers (i. e. des individus dont la feuille de paie dépend de la "contribution solidaire" d’autrui), de moins en moins de gens paient réellement des impôts, sinon par la grâce d’un artifice comptable. Vu ensuite que les pouvoirs publics et leurs satellites ne cessent de coloniser l’économie du pays, les impôts continuent d'augmenter sous diverses formes (et, à cet égard, la réforme fiscale est l’un des plus beaux exemples d’arnaque de ce début de millénaire) et même d'être créés. Il y a donc de moins en moins de gens qui payent des impôts, mais ceux-ci sont de plus en plus lourds.
Ensuite, évoquant la distribution d’allocations familiales, l’auteur s’exclame triomphalement : "Tiens, voilà déjà un avantage offert par l’Etat !". Merci pour le scoop ! Chacun de nous sait bien que l’organisation étatique octroie des avantages... c’est même pourquoi certains veulent généralement tirer de lui leurs revenus. Seulement, personne n’ignore (hormis notre candide chroniqueur) que ce qu’il donne aux uns, il le prend aux autres. C’est ce que les économistes keynésiens continuent de vanter comme sa supposée mission "redistributrice". Et c’est précisément cet argumentaire que développe le second article de la LB, intitulé "Et on redistribue presque tout ". On y lit par exemple :
"Evidemment, le grand ordonnateur de ces dépenses coûte lui même de l'argent. L'opérateur fiscal, le SPF Finances, compte quelque 30 000 fonctionnaires qui ont tourner la machine pour un budget annuel de 1,5 milliard d'euros. Mais, pour bénéficier d'un environnement social, culturel, sécurisé, correct, il est impensable de songer à fonctionner différemment qu'en société. Et le regroupement des ressources permet à l'ensemble de vivre correctement."
Qu’en déduire ? D’abord, de manière tristement prévisible, le journaliste confond société et Etat. Aucun libéral, fût-il libertarien, ne refuse la vie en société. C’est même l’un des fondements du libéralisme : la coopération entre les individus, couplée à l’égalité de chacun devant la loi. Introduire l’Etat dans ce schéma constitue un non sequitur, puisque ce dernier vient perturber les relations sociales pour y substituer la spoliation et la guerre de tous contre tous, en invoquant comme prétexte sa fonction de commandement - supposée indispensable à toute société ordonnée. L’ordre civilisé se voit dès lors remplacé par l’organisation des privilèges ; la ruse maligne en vient à primer sur l’intelligence mise au service d’autrui ; enfin, la liberté est pulvérisée par la coercition (à ne pas confondre avec la contrainte, inséparable de toute vie normale).
Ensuite, vous aurez relevé que M. Van Campenhout va plus loin dans sa défense du fiscalisme, puisqu’en couvrant d’éloges "le regroupement des ressources" comme nécessaire à une vie correcte, il ne fait rien d’autre que ranimer de vieux fantasmes communistes qui feraient même s’esclaffer d’outre-tombe le réputé désopilant Erich Honecker.
Humour involontaire ou paradoxe orwellien, il nous explique aussi que l’impôt permet à chacun de nous de profiter d’infrastructures gratuites ou peu coûteuses. En gros, l’Etat serait une sorte de pommier tombé du ciel tel le mégalithe de 2001, et dont les fruits sont voués à pousser jusqu'à la fin des temps. Or l’Etat ne crée pas de richesses. Sinon, il n’aurait pas besoin d’administration fiscale. Et si ce service en était vraiment un, il n’aurait pas besoin d’intimider les individus pour remplir ses coffres. Le meilleur contre-argument aux lubies étatistes est à puiser dans ces simples faits.
Bref, l’impôt semble posséder ce pouvoir magique de faire disparaître tout sens des réalités, par exemple de comptabilité, chez ses thuriféraires. Pour prendre un exemple, vanter la quasi-gratuité de l’enseignement montre à quel point nous vivons dans une société où la morale se réduit comme peau de chagrin, car cela revient à faire entrer dans le crâne des parents que la formation de leurs enfants ne vaut que dalle. Quant aux bienfaits des politiques dites de "redistribution", mon ami Constantin a magnifiquement démontré l’inanité de cet argument dans un récent post sur les pensions.
En guise d'apothéose, voici ce que nous sert le journaliste :
"Evidemment, le système n'est pas parfait, et il subit chaque année les pressions liées à l'équilibrage du budget de l'Etat. Il faut économiser d'un côté, offrir plus de l'autre, céder une partie des biens de l'Etat, répondre aux critères du Traité de Maastricht. Pas facile. Un coup d'oeil sur la loi budgétaire disponible sur le site du Budget (http://www.begroting.be/) en dit long sur la qualité du travail de nos représentants à ce niveau."
Alors que quasiment aucun de nos mandataires n'est capable de lire un bilan, les mêmes seraient, comme par miracle, ultracompétents pour voter le budget, qui est un document illisible !
Pour conclure, si quelqu’un vous reparle un jour du "consentement à l’impôt", répondez-lui que, comme la presse subventionnée, il consent sans doute à recevoir l’argent confisqué à des individus innocents et pacifiques.
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