29.8.04

Réflexions d'un anti-guerre

Valium, de l'excellent site Contrepoison, a récemment commis un post où il exposait à nouveau ses critiques contre les libertariens anti-guerre.

J'en retiens deux éléments. Tout d'abord, il accuse les anarcaps opposés à la guerre en Irak - et je signale au lecteur que nous ne sommes en francophonie qu'une poignée - d'être mus par des réflexes nationalistes que nous pourrions décrire comme suit: "SH était chez lui; il ne fallait pas l'emmerder". Or ce n'est pas le cas (de même qu'il est absurde de considérer que les autres anti-guerre sont tous des antisémites ou d'affreux saddamites). Cette guerre, comme toute autre offensive, détruit les propriétés des habitants (à commencer par la propre vie de plusieurs d'entre eux). En réalité, ce sont le déclenchement des hostilités et l'invasion du pays qui montrent que le gouvernement US - en cela pareil à tous les autres - a estimé que l'Irak et les Irakiens n'étaient que des biens appartenant au sinistre despote.

Le deuxième élément à examiner est une analogie, désormais fameuse, reprise par la plupart des pro-guerre. A savoir qu'il est légitime qu'un criminel en arrête un autre. Cet argument est séduisant, et en soi il n'est pas faux. Seulement, prenons le cas d'un voyou qui - en guise de repentance - met la main au collet d'un saligaud qui a dérobé le sac d'une vieille dame. On ne peut que saluer ce geste noble et courageux et encourager la canaille repentie à persévérer dans cette voie. Tout autre est le cas d'une organisation étatique qui décide de mettre un terme aux activités d'un tyran rival. En effet, n'oublions pas que toute action gouvernementale, à la différence de celle d'un quidam ordinaire, implique une aggravation de la situation de ses administrés. C'est encore plus vrai dans le cas d'une guerre, qui nécessite des budgets extraordinaires, impliquant des levées pharaoniques d'impôts, des restrictions à la liberté d'expression, l'injection massive de liquidités dans des industries en relation directe avec le gouvernement, une législation de circonstance qui - après le conflit - au mieux restera inchangée, au pire sera renforcée. Sans oublier, naturellement, les agressions commises contre des innocents dont le seul tort est d'habiter dans le pays adverse. Enfin, la bravoure des gouvernants, à la différence de l'exemple donné en début de paragraphe, est plus que sujette à caution : invectivant les "lâches" et les "traîtres" qui refusent de participer à leur croisade, ils ne manquent en effet pas de culot, puisqu'ils sont courageux avec le sang des autres.

Pour terminer, j'aimerais rappeler deux points : d'abord, à titre général, si nous savons tous en qualité d'anarcho-capitalistes que l'Etat n'est qu'une organisation servant à opprimer la population, je ne vois pas pourquoi cette même organisation deviendrait d'un coup de baguette magique un instrument humanitaire de liberté pour les autres peuples. Je suis peut-être un Bisounours, mais je ne crois pas au Père Noël.

Ensuite et enfin, les libertariens ont vocation à faire reculer les positions étatiques, pas à les faire avancer. Or une guerre étend toujours un peu plus loin les rêts de l'Etat. Nous ne le répèterons jamais assez : "la guerre est la santé de l'Etat" et le cancer rongeant l'amour de la liberté.

11 commentaires

Blogger jabial a écrit...
En effet, l'Etat n'a pas plus de légitimité à mener une guerre contre une ordure qu'à soigner des gens : dans les deux cas, il le fait grace à l'esclavage des contribuables.

Toutefois, ce que je reproche le plus aux anti-guerre, ce sont leurs arguments contre la guerre en soi, en dehors du fait qu'elle est menée par un Etat (ce qui la rend évidemment illégitime au niveau du Droit naturel). Et ce dont j'ai peur, c'est que lorsqu'existera une zone libre sur cette planète, la majorité de ses habitants choisissent le non-interventionnisme, puis carrément de sacrifier les interventionnistes, sur les mêmes critères.

C'est pourquoi je le redis encore une fois : abstraction faite des impôts prélevés aux Américains, le bilan l'opération menée en Irak est largement positif malgré quelques impairs.
à 4:38 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
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à 6:25 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
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à 6:54 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
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à 6:54 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
"Toutefois, ce que je reproche le plus aux anti-guerre, ce sont leurs arguments contre la guerre en soi, en dehors du fait qu'elle est menée par un Etat (ce qui la rend évidemment illégitime au niveau du Droit naturel)."

Je suis opposé - comme d'autres libertariens - à la guerre offensive initiée par un Etat. Je ne pense pas que tu puisses écrire: "en dehors du fait qu'elle est menée par un Etat", car le concept de guerre n'a de sens que lorsqu'existe un Etat.

"Et ce dont j'ai peur, c'est que lorsqu'existera une zone libre sur cette planète, la majorité de ses habitants choisissent le non-interventionnisme, puis carrément de sacrifier les interventionnistes, sur les mêmes critères."

Et s'ils n'ont pas envie d'intervenir, c'est leur affaire, non ? Il devraient être solidaires de tout le monde - contraints et forcés ? Qu'entends-tu ensuite par "sacrifier les interventionnistes" ?


"C'est pourquoi je le redis encore une fois : abstraction faite des impôts prélevés aux Américains, le bilan l'opération menée en Irak est largement positif malgré quelques impairs."

Là, je dois t'avouer que j'en reste baba ! Si j'étais méchant (ce que je ne suis pas), j'ajouterais que le "bilan largement positif" me rappelle le propos d'un "illustre" politicien français...

Franchement, la guerre en Irak illustre bien le chaos du planisme (en l'occurrence militaire).
à 6:56 PM
 
Blogger jabial a écrit...
Je suis opposé - comme d'autres libertariens - à la guerre offensive initiée par un Etat. Je ne pense pas que tu puisses écrire: "en dehors du fait qu'elle est menée par un Etat", car le concept de guerre n'a de sens que lorsqu'existe un Etat.Bien au contraire. La guerre est une action violente menée par une organisation (un groupe d'individus) contre une autre. La légitimité des organisations respectives n'a rien à voir avec le concept.

"Et ce dont j'ai peur, c'est que lorsqu'existera une zone libre sur cette planète, la majorité de ses habitants choisissent le non-interventionnisme, puis carrément de sacrifier les interventionnistes, sur les mêmes critères."Et s'ils n'ont pas envie d'intervenir, c'est leur affaire, non ? Il devraient être solidaires de tout le monde - contraints et forcés ?Certainement pas.

Qu'entends-tu ensuite par "sacrifier les interventionnistes" ?Mener une action agressive contre eux pour éviter des représailles de la part de ceux que ces interventionnistes attaquent.
à 6:59 PM
 
Blogger jabial a écrit...
J'oublais de répondre au dernier argument, utilitariste celui-là. Non, la guerre n'est pas la santé de l'Etat - elle coûte très cher à l'Etat qui la mène, les "locataires de l'Etat" (dirigeants) voient généralement leur popularité baisser très vite, et à cette ocasion beaucoup de gens qui ne l'auraient pas fait en temps normal remettent en cause la légitimité de l'Etat, et se retrouvent donc nos alliés objectifs sans le savoir.

En plus, la guerre met généralement fin à un Etat ; ainsi, on ne peut pas décemment ni sérieusement dire que la guerre contre la nazisme a fait reculer la liberté, même si certains (je n'ai pas encore vu ça ici) n'hésitent pas à le faire.

Pour résumer, la guerre n'est ni bonne ni mauvaise pour un Etat - elle lui apporte à la fois des avantages et des inconvénients. Elle est surtout mauvaise pour ceux qui la paient et en subissent les conséquences sans l'avoir désirée. C'est pourquoi une opération de police suffisament importante pour être qualifiée de guerre devrait toujours être financée à fonds privés - comme toutes les opérations légitimes. Quant aux autres guerres, elles ne sont évidemment pas légitimes, et la question ne se pose même pas.

Je recommande à ce sujet la lecture des derniers articles de Chitah sur liberaux.org.
à 11:29 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
La guerre ne coûte pas cher à l'Etat, elle coûte cher au contribuable. Les hommes de l'Etat s'en soucient assez peu, à preuve la présente guerre. En outre, je ne vois pas trop en quoi ton argument serait moins utilitariste que le mien, mais peu importe. Je dois te dire que ton obstination à défendre la guerre à tout prix (c'est le cas de le dire !) me laisse perplexe. Ne serais-tu pas un chouïa fasciné par la violence ?

Il est cependant vrai qu'un Etat peut être défait à la suite d'une guerre, mais précisément les dirigeants emportés par leur hybris (cf. Bush et ses conseillers) laissent de côté ce paramètre.

Concernant la seconde guerre mondiale, comme le territoire belge a été envahi par l'armée allemande, comme en 1914 - il était évidemment légitime de se défendre. Cela va de soi.

Maintenant, je serais intéressé de connaître ton opinion sur ma réponse aux arguments de Valium.
à 11:36 AM
 
Blogger Constantin a écrit...
Eskoh et Ronnie ont déjà amplement répondu dans le sens où je comptais poster, mais je tenais à faire acter que j'abonde dans leur sens.
à 1:14 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
Tiens, ce n'est pas utilitariste comme raisonnement, ça ?

Toute action humaine n'est pas légitime, Turion. En particulier, quand elle consiste à envahir un territoire et à violer la propriété d'autrui deux fois (au moins): en détruisant la richesse du contribuable captif et en bombardant des civils innocents. Il serait temps de redescendre sur terre.

Bravo, c'est en soutenant de telles initiatives que les libéraux passent pour des fachos. Il ne sert alors à rien d'apostropher et d'injurier des gauchistes qui ont beau jeu de mettre les bellicistes devant leurs contradictions: si j'ose dire, c'est de bonne guerre.

Et j'attends toujours que les pro-guerre me répondent sur la teneur de mon post initial.
à 3:15 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
En tout cas, ce n'est pas en tenant des propos comme celui retranscrit ci-dessous que les libéraux pro-guerre convaincront de leur amour de la liberté:

"on ne peut atteindre cet idéal que si les sociétés libres survivent, et cela passe certainement aujourd'hui par un sursaut d'étatisme..."
à 7:27 PM
 

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