12.5.06

Les Lumières de la Ville


Epluchant mes journaux de la semaine dernière, je tombe aujourd'hui sur un extrait du quotidien Le Soir du 3 mai (article non disponible en ligne), où est évoqué l’Observatoire international de la nuit... création de l’échevin bruxellois de l’Urbonanisme & de la Cuculture l’écologiste Henri Simons - AKA " le Vert dans le fruit ". Vous noterez d’abord qu’il n’y a pas qu’en France - patrie des Lumières où chaque faction politique prétend renvoyer dans les ténèbres ses concurrentes - que l’on prend sa vessie pour une lanterne. Les politiciens belges, et bruxellois en l’occurrence, ne se lassent jamais d’imiter les tics (pour "Troubles interventionnistes compulsifs") et manies de leurs homologues français. Du reste, une association hexagonale, la Maison du Temps et de la Mobilité (!!) parraine cette initiative audacieuse.



En m’aventurant sur le site de cet Observatoire, j’ai noté que le vernis culturel de cette association craquait assez vite. En effet, citant Nietzsche, les responsables du site ont omis le Z de son nom. Sans doute ont-ils préféré tenter l’expérience hautement excitante d’écrire dans la plus complète obscurité, histoire de valoriser l’objet de leur préoccupation. L’obscurité entretenue politique prédispose-t-elle donc à l’obscurantisme ? Comment une telle pensée malveillante me viendrait-elle à l’esprit ?!


Tout ceci pour dire que des questions d’une rare gravité étaient posées dans "Le Soir" à l’un des responsables de ce bidule carnavalesque. Ainsi : "N’y a-t-il pas un danger de la privatisation de la nuit ?" Qu’est-ce à dire ? Non, rassure-toi, ami lecteur, il ne s’agissait pas dans l'esprit du journaliste d’obliger les personnes voulant dormir dans les bras de Morphée ou de leur dulcinée à demander une autorisation en trois exemplaires auprès de leur administration communale. Non (du moins pas encore); le souhait de l’association est plus modestement d’animer la ville. Notamment à grands coups de symposiums. Voir ce discours d’Evelyne Huytebroeck, ministre bruxellois, prononcé - cela ne s’invente pas - un 1er avril... Une des manifestations de la politisation de la vie nocturne n’est autre que la Nuit blanche, autre brillante idée venue de JackLandie - devenue la seconde fête officielle bruxelloise, après la Zinneke Parade - orchestres rouges, jongleurs de l'anticapitalisme, funambules de la subvention, théâtreux opposés à "la société du spectacle", cracheurs de feu à la gueule du contribuable, politiciens rubiconds en rollers, tous se donnent le mot chaque année pour empêcher les grincheux de dormir peinards, ulcérés que sont ces derniers de voir l’usage qui est fait de leurs impôts. Vive donc l’égalité entre le jour et la nuit, et tant pis pour les exploiteurs en bonnet de nuit !


Il semble que cette égalisation autoritaire des mouvements de notre horloge biologique ait échappé au journaliste vespéral qui demande avec angoisse : "N’y a-t-il pas aussi un risque, en développant l’activité la nuit, d’augmenter encore les inégalités ? On aura ceux qui vont s’amuser et les autres qui vont travailler." Hé oui, c’est ainsi : même si l’on veut boboïser la nuit-qui-n’est-pas-une-marchandise, il faudra bien que des gens bossent pour que les noctambules aient l’impression de ne pas avoir pris froid pour rien ! Ça c’est du scoop, coco ! Le socialisme découvrant sous les paillettes festives les lois de l’économie, alors qu’il pensait les mettre sous l’éteignoir de l'altermondanité, cela vous a toujours quelque chose de jouissif.

2 commentaires

Blogger Unknown a écrit...
Très drôle. Et ... à dormir debout.
à 10:39 PM
 
Blogger RonnieHayek a écrit...
J'avais l'intuition que ça t'intéresserait ! ;-D
à 9:31 AM
 

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