28.1.07

L'Etat à chaque carrefour

Lorsque les libertariens développent leur théorie d'un monde entièrement privatisé, une objection revient fréquemment : "Mais qu'est-ce qui empêcherait quelqu'un d'acheter tout un quartier et d'encercler ta maison à l'aide de murailles imprenables ou de centres de péage ?"

Cette question néglige tout d'abord que grever un bien de contraintes d'usage aussi tatillonnes qu'absurdes contribue à en diminuer la valeur.

Surtout, elle constitue un superbe deux poids deux mesures, puisqu'elle passe totalement sous silence un fait pourtant évident, à savoir que les pouvoirs publics se permettent ce genre d'incongruités, étant donné qu'ils ne sentent pas tenus par quelque considération économique que ce soit et qu'ils ont la force pour eux.

Si vous souhaitez un exemple concret et actuel, je vous conseille la lecture du numéro de The Economist paru la semaine dernière. Vous y trouverez un excellent papier intitulé "It's the little things that make an occupation". Cet article énumère les multiples tracasseries produites par la colonisation israélienne en Cisjordanie. Passeport intérieur (comme dans l'ancienne Union soviétique et l'Afrique du Sud sous l'apartheid), checkpoints ralentissant - voire empêchant - les sorties et entrées, etc. L'arbitraire policier combiné à la vexation organisée atteint son apothéose avec le cas des automobilistes se voyant retirer leur permis de conduire (et sont ensuite - cerise sur le gâteau - gratifiés d'un casier judiciaire) parce qu'ils n'ont pu se rendre au poste de police installé dans un quartier réservé aux colons, lieu dans lequel les Palestiniens ne peuvent entrer sans autorisation préalable.

Voilà une situation, hélas, bien plus réelle que la fable du méchant propriétaire anarcho-capitaliste rêvant d'emmurer son prochain.


27.1.07

La délation est la santé de l'Etat

Autrefois, la police servait à arrêter les délinquants. Aujourd'hui, elle est employée à des fins politiques: ficher et placer sur écoutes les contestataires de tout poil et, désormais, vérifier si les ordres du Big Brother sanitaire sont respectés. Des délits sans victime sont donc verbalisés, de surcroît sur dénonciation. Cela donne une haute idée de la mentalité ambiante. À l'évidence, le mouchardage est une activité qui ne peut que s'accroître dans nos sociétés de plus en plus socialistes. Comme l'écrit Pierre Lemieux, adversaire résolu du totalitarisme sanitaire: "Quand l'État dicte ce que l'on peut consommer chez soi, comment ranger une arme dans sa chambre à coucher, ou comment rédiger des affichettes dans son commerce, le mouchardage devient un outil indispensable de politique publique. Quand il n'y a pas de cadavres, il faut un mouchard."

La santé morale de nos contemporains semble décidément vouée à être chaque jour davantage minée par le cancer social-démocrate. Le pire est donc encore probablement à venir.


25.1.07

L'Injustice fiscale

Les élections françaises approchant, plusieurs débats télévisés commencent à aborder la question fiscale. La plupart des représentants politiques et associatifs ne se lassent pas de vitupérer "ces richards qui viennent pleurer alors que l'impôt progressif ne représente qu'un faible pourcentage des recettes fiscales !". Naturellement, ces messieurs-dames se placent du point de vue de l'État et non de ses victimes qui se font racketter... Or, pour ces dernières, ce ne sont pas quelques unités de pourcents de leurs revenus qui s'en vont, mais au moins dix ou quinze fois plus ! C'est le principe même de l'impôt progressif, totalement discriminatoire (trouverait-on normal qu'un boulanger fasse payer plus cher le même pain à un P-DG qu'à un salarié?) - auquel les socialistes ont ajouté dans les années 80 le tout aussi détestable et spoliateur ISF (mieux connu comme "impôt de socialisation de la fortune") - que tout libéral doit condamner. On retrouve chez les défenseurs de la progressivité fiscale (synonyme de régression civilisationnelle) les arguments socialo-démocratiques classiques tentant de justifier l'oppression de gens appartenant à une minorité et laissant entendre que leur rendre justice n'est pas prioritaire, voire constituerait une odieuse trahison envers la patrrrrrrrrrrie en danger.

L'impôt progressif sur le revenu ne représentant effectivement qu'un pourcentage faible (environ 20%, si j'en crois ces données) des rentrées fiscales en France (constat que généralisait déjà Hayek dans sa Constitution de la liberté), il serait aisé de l'abolir d'un trait de plume. Par conséquent, le refus de le supprimer n'a rien à voir avec la peur d'un "bain de sang" social, mais est uniquement fonction de l'idéologie égalitariste haïssant les producteurs de richesse.

Ceux qui raillent aujourd'hui l'exil fiscal de Johnny sont en réalité des veaux bêlants toujours prêts à gueuler leur "envie d'avoir toujours envie"...


20.1.07

L'Habeas Corpus selon Alberto Gonzales

Toujours aussi prompt à justifier les atteintes croissantes aux libertés publiques piétinées allègrement par l'équipe Bush, Alberto Gonzales, le ministre de la Justice américain, a déclaré avec assurance que l'habeas corpus n'était pas explicitement garanti par la Constitution US. Peut-être devrait-il relire la section 9 de l'article 1er de celle-ci...

Sans doute est-ce parce que ce n'est pas une liberté si fondamentale que cela qu'un glossaire constitutionnel juge utile de préciser: "It is important to note that of all the civil liberties we take for granted today as a part of the Bill of Rights, the importance of habeas corpus is illustrated by the fact that it was the sole liberty thought important enough to be included in the original text of the Constitution." ("Il importe de noter que, de toutes les libertés que nous tenons aujourd'hui pour garanties comme une partie de la Bill of Rights, l'importance de l'habeas corpus est illustrée par le fait que ce fut la seule liberté considérée comme suffisamment essentielle pour être incluse dans le texte original de la Constitution.")

Ce modèle de scrupule juridique qu'est Gonzales a de quoi inspirer les États européens, Belgique en tête - dont le gouvernement s'ingénie à légaliser des pratiques d'espionnage contre les citoyens avec un zèle digne des néo-bolcheviques de Washington.


16.1.07

Au suivant

Correa, élu président d'Equateur, et c'est tout le pays qui effectue un virage à gauche. Au programme: réforme de la constitution et réforme de l'économie, renégociation des contrats de fourniture d'électricité, de télécommunication, d'exploitation du pétrole, rejet du libre-échange avec les Etats-Unis... La victoire de Correa, présentée comme une petite victoire politique pour Chavez, son homologue vénézuelien, est le nouveau chapitre de la révolution citoyenne globale sud-américaine.

La résistance à une certaine hégémonie américaine peut s'envisager mais elle devient totalement caricaturale lorsque le socialisme sud-américain ne se définit que contre l'ennemi. Vouloir se libérer de l'influence du FMI ou de la Banque Mondiale, pourquoi pas; mais présenter ces organismes supra-étatiques comme des suppôts d'un ultra-libéralisme diabolique est pour le moins erroné.

Si le socialisme équatorien prend la même direction que le socialisme vénézuélien, on pourrait vite voir arriver nationalisation des ressources, corruption, détournements, intimidation, pressions diverses...

Présenter ces révolutions socialistes corrompues, destructrices et liberticides comme étant bolivariennes paraît pour certains aspects bien ironique...


9.1.07

Le mur s'effrite

Il y a deux mois, une nouvelle lubie étatique et autoritaire était dénoncée ici-même par Ronnie: la création d'un stage parental, dispositif censé aider par la contrainte les parents de jeunes délinquants. La recette nous était bien sûr présentée comme alliant prévention, éducation, aide sociale et création d'emplois. Le tout nappé d'une bonne sauce de démagogie: il fallait répondre à l'indignation des belges devant l'insécurité de nos gares, de nos rues.

Deux mois à peine donc, et le soufflet retombe déjà.

D'abord, il semble que ce genre de mesure, malgré un élan politique initial (vous avez dit démagogie?) n'a pas donné de résultat très concluant là où elle a été appliquée. Les mauvaises langues diront sans doute que c'est simplement parce qu'aucune évaluation n'a eu lieu? En France, le dispositif semble en passe d'être totalement abandonné sur le terrain, malgré les déclarations des politiques enthousiastes.

Ensuite, la mise en place de ce dispositif en Belgique pour avril 2007 a déjà donné lieu à quelque bricolage dont notre pays a le secret pour assurer le recrutement. Le financement reste décidement le nerf de l'extension du domaine de l'Etat. Peu importe puisque les acteurs de terrain semblent avoir bien peu d'enthousiasme: ils l'avaient même qualifié de gadget politique, imposé globalement sans même avoir fait l'objet d'expériences pilotes.

Rendez-vous en avril pour juger de ce mauvais plat réchauffé...