Il faut enterrer l'impôt sur la mort !
Le Figaro
a publié hier une
tribune de Pascal Salin dénonçant avec fermeté l’injustice de l’impôt sur la mort. La force de ce texte est de montrer le caractère proprement ignoble de cet impôt, probablement le pire de tous ceux qui existent avec
l’impôt progressif sur le revenu.
Salin fustige avec vigueur les socialistes de tout poil qui voient dans toute diminution, voire suppression, de cet impôt un "cadeau fiscal fait aux riches". En d’autres termes, dans l’esprit des collectivistes, l’État serait le propriétaire des richesses produites par les individus ! Cette "logique" est typiquement communiste, ainsi que le note l’économiste libéral. En vérité, la brutalité de cet impôt a pour effet (voulu) de détruire le patrimoine constitué par les individus et de le remettre entre les mains de l’appareil étatique qui pourra ensuite le dépenser allègrement.
Un exemple éloquent est offert par l’érosion des patrimoines immobiliers à Bruxelles, qui s’explique par cette entreprise de spoliation. Les héritiers se faisant racketter cèdent aux pouvoirs publics le bien que le défunt leur avait destiné parce qu’ils n’arrivent pas à réunir le montant de la rançon exigée ou bien parce qu’ils refusent de faire peser à long terme une charge sur ceux qui leur succéderont.
Dans un billet opposant Pascal Salin à l’économiste officieux du PS Thomas Piketty, A. Delaigue du site Econoclaste (qui avait déjà montré par l’exemple son goût "scientifique" pour l’éthique de discussion) fait semblant de croire qu’il y a un équilibre à tenir entre le keynésianisme pontifiant de Piketty et l’idéologie cohérente de Salin. Ou plutôt, s’il critique le premier, c’est - me semble-t-il - parce qu’il trouve que ses arguments sont insuffisants compte tenu de l’objectif social-démocrate qu’il défend. Il suffit de voir avec quel désappointement Delaigue considère que les arguments de Piketty sont, selon lui, "inaudibles" en France. À cet effet, il recourt même à un homme de paille en expliquant que l’on entendra plus souvent à la télévision des gens se plaindre de l’Etat spoliateur que des personnes prétendant avoir retrouvé du travail grâce à la diminution des charges "sociales"...
En outre, si l’éconoclaste chroniqueur admet le caractère éthique de ce débat, c’est pour des raisons purement quantitatives, puisqu’il écrit : "Car la question de l'impôt sur les successions est éthique avant d'être économique : cet impôt, après tout, représente une très faible part des recettes publiques." Autrement dit, si l’impôt sur la mort constituait le gros des recettes fiscales, il ne poserait pas de problèmes moraux !
Une preuve que l’auteur a fondamentalement le cœur qui balance pour le social-démocrate Piketty apparaît très clairement dans le dernier paragraphe :
"C'est pourquoi, dans la bisbille entre Piketty et Salin, ce n'est pas parce que le premier a le pragmatisme et la science économique avec lui qu'il l'emportera; les idéologies, bien qu'elles soient inadaptées à la complexité du monde, ont un avantage qu'on peut déplorer, mais qu'on aurait tort de négliger."
En clair, Piketty se voit crédité d’un pragmatisme (on se demande bien lequel, sinon de ne vouloir saigner le contribuable "que" jusqu'à X ou Y pourcents...) et auréolé du titre envié de scientifique, tandis que Salin ne serait qu’un idéologue refusant la Science (au sens hégélo-lyssenkien du terme). De plus, ce dernier n’a pas l’heur d’accepter la "complexité du monde" qui nécessiterait aux yeux de notre keynésien la justification de l’interventionnisme étatique le plus spoliateur. Delaigue, craignant que les arguments de Salin ne l’emportent, semble donc proposer à Piketty de mettre un peu plus d’idéologie dans sa tisane universitaire - comme s’il avait attendu cet amical conseil.
C’est ce qui s’appelle l’objectivité scientifique...
Le PS : roi de la prise d'otages
Dans une interview publiée aujourd’hui dans "Le Soir", le Lider Marxismo du PS bruxellois, Philippe Moureaux (AKA le Stal’ du canal) distille une fois encore son venin, l’une de ses cibles de choix étant, parmi d’autres, Alain Destexhe - preuve que celui-ci a tapé où ça faisait mal en dénonçant la culture politique socialo-mafieuse en Wallonie. Ce n’est, du reste, pas la première fois que Flupke Moustache, empereur indétrônable de la mauvaise foi, attaque le sénateur MR, l’ayant naguère traité de "collabo du VB". Il est toujours curieux de voir les socialistes donner des leçons d’antifascisme (de surcroît, à des gens peu suspects de ce genre de sympathie !). Sans doute est-ce une manière d’occulter le comportement d’un certain président du POB en 1940, en sus de pratiquer le terrorisme intellectuel - dont Flupke Moustache s’est fait une spécialité - à l’encontre de ceux qui refusent la dictature socialiste en Wallonie et à Bruxelles.
Puisqu’il est question de "terrorisme", c’est de ce crime que Moureaux accuse le Ministre-Président flamand Yves Leterme. Le malveillant donneur de leçons reprend la rumeur selon laquelle ce dernier aurait attaqué verbalement la famille royale (alors qu’il semble que ses propos aient été tronqués). Que Leterme soit antimonarchiste ou non, dans le fond, cela peu importe ici ; le point réellement inquiétant est que le marxiste molenbeekois montre, lui, le peu de cas qu’il fait de la liberté d’expression, tout à son obsession de la criminaliser.
Une question doit également être soulevée. Pourquoi donc les socialistes, descendants proclamés des régicides de 1793, s’enthousiasment-ils désormais tellement pour l’institution monarchique ? L’objectif du PS est en réalité de préserver, non l’unité du pays, mais le maintien des transferts fiscaux en direction de la Wallonie et - par ricochet - son pouvoir dans le sud du pays.
Dès lors, en accusant les Flamands de mettre la pression sur la famille royale, Moureaux cherche à noyer le poisson en dissimulant (très mal) que le PS veut prendre en otage le Roi, si ce n’est déjà fait, pour l’obliger à masquer, puis éventuellement endosser la faillite du pays, et de la Wallonie en particulier.
Sortie autorisée
Excellent
billet de Climax sur le scandaleke de l'été.
J'ai pas mal traîné sur l'indispensable
Humeur allochtone ces derniers temps où je me demande, en susbstance, comment on peut être un habitant du Türkbeekistan (traduction à l'attention des non-initiés : les quartiers à majorité turque qui bordent la chaussée de Haecht de Saint-Josse à Schaerbeek). Candide a été récompensé, puisque j'ai eu droit à une très intéressante réponse d'Erdem Resne, que je ne connais ni d'Eve ni d'Adam et qui ne me connait pas plus. Avec son aimable autorisation, je la reproduis ci-dessous.
Ce phénomène est très fort chez les Turcs, mais pas seulement. Quand tout Liège vote pour la famille Daerden sans regarder le prénom, cela participe aussi d'un sentiment communautariste/régionaliste à combattre. Ce que je dirai donc ici n'est pas propre aux Turcs. C'est seulement plus prononcé ou plus visible chez eux, tout simplement car la capacité de mobilisation est plus grande (grâce notamment au contrôle du pays d'origine).
Si tu comprends le turc, tu peux zyeuter binfikir.be où j'ai longuement abordé ce type de sujets, précisément pour contribuer à l'apparition d'un sentiment de citoyenneté chez des gens qui, depuis 40 ans, vivent et construisent leur avenir ici. Faire comprendre aux gens qu'en plus de disposer de droits et de facilités, ils avaient des devoirs: participer au processus décisionnel, être actifs socialement etc...
Ce qui n'empêche pas d'avoir des liens ou des visions politiques concernant la Turquie bien évidemment, mais la préoccupation première d'un élu Belge ne doit pas être l'adhésion de la Turquie à l'UE (sauf s'il devient ministre fédéral et participe aux décisions lors de sommets européens.)
S'intéresser à la vie politique locale ça suppose également un certain niveau d'investissement socio-culturel, ce qui malheureusement, n'est pas chose courante: je ne justifierai donc jamais le communautarisme, mais c'est un phénomène qui doit être compris. Quand vous êtes issu d'une famille qui s'est installée dans les régions minières, qui n'a jamais connu de vie urbaine dans son pays, qui se retrouve dans un environnement ou la moindre vue de jambes dénudées engendre des réflexions de type "je dois protéger mes enfants de ce monde pervers", qui compte les jours pour calculer la fin du mois, vous ne pouvez pas exiger d'eux de se rendre au conseil communal pour voir ce qui y est décidé, puis d'aller voir la dernière pièce d'Eric-Emmanuel Schmitt. C'est caricatural, mais même moi qui suis Turc et pourtant "habitué" à fréquenter des personnes dans le besoin, je suis parfois choqué de voir dans quelle misère et quelle ignorance vivent les gens.
Ce que la population d'origine turque attend de SES élus, ce n'est malheureusement pas l'amélioration de la politique belge; et pour tous vous détromper, ils n'attendent même pas d'eux qu'ils défendent les intérêts de la politique officielle turque (ces discours populo-fascisants sont relayés par quasi toutes les associations simplement dans le but de perpétuer au sein de la diaspora le sentiment d'appartenance nationale et de conforter les gens dans leur ignorance, mais le gars de la rue se fout royalement du génocide, il pense comme tout le monde par conditionnement et l'affirme pour ne pas être banni, mais il ne pense pas toute la journée aux conséquences de l'éventuel vote de la loi, il s'en FOUT). Ce que la population d'origine turque attend vraiment de SES élus, c'est malheureusement des PISTONS pour élaborer leurs magouilles plus facilement. Nombre de nos élus aujourd'hui ont des connaissances dans les principaux organes d'état (dont l'Office des étrangers), d'autres sont actifs dans l'immobilier ou le commerce, et ces élus s'assurent ainsi l'allégeance et les voix des personnes dont elles contribuent à l'installation ou à la naturalisation ou à l'ouverture d'un commerce en Belgique.
Et les partis politiques contribuent à cela puisque les candidats vraiment intelligents sont écartés, au détriment de ces magouilleurs qui rapportent des voix en utilisant les discours populistes que tout le monde adopte pour se donner bonne conscience.
La milletisation politique, c'est également le résultat du système belge partitocratique où la réussite passe (pour les Belges pure-souche, comme pour les allochtones) par la longueur des tentacules. Et l'organisation communautaire permet ce genre de réussite, car les sentiments d'appartenance ethniques et religieux sont très forts.
La milletisation, c'est le résultat des constats de parents qui voient que leur aîné, qui a fait des études, se retrouve au chômage, tandis que le cadet-presque-délinquant à qui on a trouvé 12.500€ pour ouvrir un snack roule maintenant en Mercedes et confirme les préjugés de sa caste qui se dit que de toute façon, "on s'en fout de la politique ou de la culture, ce qui compte c'est d'être un homme - un vrai, - riche, fort, respectable dans la communauté - et aller dans le sens de tout le monde sans trop déranger les sentiments d'honneur et de fierté".
Et le comble, c'est que toute critique envers cette mentalité la renforce davantage, car les mécanismes de défense sont puissants. Il faut éduquer ces gens mais arrêter de leur ressasser leurs erreurs sans leur donner les moyens de comprendre ces erreurs: culture et indépendance économique.
Erdem Resne
Le PS et les z'immigrés: une longue histoire d'amour dénuée de pensées intéressées
Via
Tractothèque, le blog de Pierre-Yves Lambert.
Here comes the Flood
"Nous vivons dans un monde de plus en plus égoïste", "Les gens sont repliés sur eux-mêmes, sans souci pour les autres, et cela va aller en empirant". Ces déplorations sont devenues monnaie courante. Dans une large mesure, je suis d’accord avec elles, mais le problème est que la majorité des individus en tirent une conclusion fautive : "C’est la faute du capitalisme ‘ultralibéral’".
Alors que nous vivons dans des sociétés où l’Etat occupe une place chaque jour plus envahissante, que l’impôt confisque plus de la moitié de la richesse produite, que les actifs cotisent non pour leur retraite, mais au bénéfice des pensionnés actuels, nous vivrions dans un monde où règne l’économie libérale ? Alors donc que chacun se dit : "La solidarité, c’est à l’État de s’en occuper, pas à moi.", l’égoïsme sordide serait imputable à la "domination capitaliste" ?
Les hommes de l’État dépensent sans compter, versant allocations et rentes en quantités astronomiques, en se disant que les générations suivantes payeront de toute façon les dettes contractées puisqu’elles n’auront pas le choix de refuser - l’État étant le maître absolu. Se pose quand même cette question : qui bénéficie des faveurs de la puissance publique ? Des gens altruistes et soucieux du bien d’autrui ? Les victimes de la rage taxatoire seront soulagées de l’apprendre.
Comme l’avait admirablement montré le philosophe Michaël Polanyi, c’est le socialisme qui détruit tout lien social, isolant de la sorte chaque individu du reste de ses semblables : car il est subjugué par la puissance coercitive de l’État, face à laquelle il se retrouve tout seul. L’administration de l’économie par l’organisation étatique, ainsi que sa réglementation affolante, sont des phénomènes proprement déresponsabilisants, qui déshumanisent l’être humain.
La supériorité du capitalisme sur le socialisme et toute forme de dirigisme économique est qu’il connecte les individus les uns aux autres par la division du travail combinée à un système de prix et d’échanges, qui ne sont pas fonction de la volonté du Prince, mais simplement le résultat d’actions individuelles multiples et différenciées. Ce n’est pas seulement une supériorité en termes d’efficacité, mais plus essentiellement en termes de morale. En effet, une économie libre apporte aux individus ce qu’ils demandent sans contraindre des tiers à payer contre leur gré. Les services s’échangent contre d’autres services. C’est seulement dans ce cadre que l’on peut parler de véritable coopération, et non quand la spoliation étatique saigne le contribuable au nom du "service public" et de la "justice sociale". Car, à travers l’interventionnisme socialiste, aucun service honnête n’est rendu : ce ne sont qu’extorsions, menaces, intimidations, expropriations - tout cela pour engraisser les supporters du régime.
La liberté authentique est le moteur d’un ordre logique du monde ; le socialisme constitue, en revanche, un acte de sabotage contre cet ordre - pire : une tentative de dislocation du monde, atomisant la société en êtres égarés et esseulés, attendant tout de l’État. L’individu selon les socialistes est un isolat dans un bocal, objet d’expériences pseudo-scientifiques, servant à créer l’homme nouveau. Or il est évident que personne ne peut vivre à l’écart du reste de la société : il a besoin d’autrui... mais en apportant en retour sa propre coopération, à travers ses connaissances, son savoir-faire, etc. Nul besoin de diktat pour ce faire : c’est le fonctionnement normal d’une société. Et c’est comme résultante de ces milliards d’interactions individuelles que surgit ce "marché" tant décrié comme s’il s’agissait d’une organisation instituée sur décret un beau matin. Constatons que, bizarrement, la véritable organisation coercitive qu’est la puissance étatique est louangée comme si elle était notre Sauveur.
Le " Dieu mortel " ornant le frontispice du Léviathan de Hobbes est le symbole inquiétant du paganisme persistant de nos sociétés. Que la destruction des libertés publiques soit promulguée par ceux qui, simultanément, fêtent à coups de grasses subventions l’hédonisme le plus vulgaire devrait nous donner également à réfléchir.
Dans le fond, les socialistes - ces sculpteurs de ruines sociales et morales - aiment à reprendre ce mot que l’on prête à Louis XV : "Après nous, le déluge." N’est-ce pas là le signe incontestable d’un égoïsme ignoble, qui va croissant ?
Les failles du constitutionnalisme
Je me permets de revenir sur le projet totalitaire du gouvernement communiste francophone dénoncé par Climax, Constantin, Thierry, et également ce présent blog. En bref, les planificateurs qui nous régissent voudraient soumettre les choix scolaires des parents à une autorité centrale.
Or l’article 24 de la Constitution dispose en son § 1er que "la communauté assure le libre choix des parents". Cette garantie risque donc de voler en éclats à cause d’arrangements plus ou moins occultes entre factions partisanes et syndicales. Cette nouvelle étape vers le collectivisme intégral est un exemple supplémentaire qu’une Constitution n’est pas d’un grand secours pour préserver les droits individuels.
Je rappelle que, du point de vue libéral classique, la Loi fondamentale était un instrument permettant de freiner les ardeurs du Souverain, fût-il "le peuple". La menace étatique était clairement perçue par un Benjamin Constant, qui déclara lors de son premier discours au Tribunat :
"Une Constitution est par elle-même un acte de défiance, puisqu'elle prescrit des limites à l'autorité, et qu'il serait inutile de lui prescrire des limites si vous la supposiez douée d'une infaillible sagesse et d'une éternelle modération."
En clair : l’État est un mal qu’il faut maîtriser par la force de la loi si nous voulons vivre librement. Seulement voilà : d’une part, une Constitution est un acte législatif qui peut toujours être soumis à révision et amendé (moyennant certaines conditions plus ou moins restrictives) ; de l’autre, elle peut être contournée sans que le législateur soit puni. Aucune Cour constitutionnelle ne punira d’amende ou d’emprisonnement une majorité parlementaire qui votera des lois anticonstitutionnelles ni le gouvernement qui les exécutera. En d’autres termes, la Constitution, loin d’être un rempart contre la nuisance étatique, est tantôt un outil entre les mains du pouvoir politique tantôt un document qu’il ignore superbement - ou encore qu'il dénigre comme un ramassis de précautions obsolètes ("Nous sommes des démocrates, n'est-ce pas, donc nous ne sommes pas des tyrans" étant, en substance, l'argument sous-jacent).
En outre, il convient de distinguer soigneusement le pouvoir étatique tel qu’il existe sur papier et tel qu’il fonctionne réellement. Qui croit encore que les parlementaires sont les représentants de la "nation" ? Qui croit encore en Belgique qu’un chef de gouvernement conduit effectivement les décisions de l’exécutif ? La réalité est beaucoup plus simple : ce sont les états-majors de partis qui s’arrangent entre eux au moyen d’une stratégie de donnant-donnant.
Or lesdits partis (comme jadis le président du Conseil de la IIIe République française) n’ont aucune existence constitutionnelle ! Cela les empêche-t-il d’être les maîtres du jeu ? Aucunement, que du contraire même. Comment pourraient-ils être tenus responsables des lois scélérates et conspirations législatives qu’ils ourdissent chaque jour, puisqu’ils n’existent pas au regard de la Loi fondamentale ? Au demeurant, l’autre vraie branche des décideurs, à savoir les syndicats, n’émane pas non plus de la "nation" : l’absence de personnalité juridique des organisations syndicales évite qu’elles puissent être sérieusement contrôlées et canalisées.
Pour conclure, une Constitution si libérale soit-elle (et le cas américain en offre une autre illustration saisissante sur laquelle j’espère revenir prochainement) ne présente des garanties que sur papier ; car elle n’est jamais que le canevas échafaudé par des politiciens en vue d’organiser politiquement un État. Contrairement aux droits naturels qui existent avant l’expression de notre volonté, elle est uniquement le produit de circonstances qui, ensuite, se joueront d’elle tôt ou tard.
La Foire aux vanités
A la faveur d’une polémique de clochers villageois entre socialistes wallons, j’ai découvert que la Ripoublique rouge wallonne parrainait depuis peu un Salon des mandataires publics, qui s’est tenu pour la première fois en février 2006. Le but officiel de l’opération était de faire se côtoyer fonctionnaires locaux, élus, et représentants du secteur privé pour qu’ils apprennent tous à mieux se connaître. A l’heure d’internet et du GSM, est-il besoin d’organiser une fancy-fair du partenariat public-privé ? Plus sérieusement, le sursaut wallon ne passera assurément pas par ce genre d’alliance entre business et gouvernement, mais par le retrait net et massif de ce dernier du paysage économique.
En vérité, ce salon permettait de faire de la pub pour le ministre de tutelle, le très dirupien Philippe Courard (dont le stand, apprenons-nous émerveillés, "a connu un franc succès") et de tenter de faire gober le mensonge que la Wallonie se porte bien. Ceci dit, il faut vraiment avoir l’esprit nomenklaturiste pour s’imaginer que l’image de cette région sinistrée sera redorée avec de telles festivités. C’est un peu comme si Brejnev et Andropov avaient organisé une "Foire des nomenklaturistes", et Gorbatchev un "Festival de la perestroïka".
Le slogan de cette vitrine socialo-régionaliste se doit d’être rappelé : "Découvrir pour servir". Lointain clin d’œil à la devise officieuse du PS : "Se servir sans être découvert" ? Du reste, qui s’agit-il de servir ? Certainement pas le contribuable qui devra raquer, jusqu'à ce que mort économique s’ensuive, pour que se matérialise dialectiquement le plan Potemkine.
PS (sic) : j’ai constaté que l’Institut belge pour la sécurité routière était présent lors de cette mascarade. Visiblement, sa campagne de sensibilisation n’a pas porté ses fruits chez la présidente du CPAS de Huy...
Les "bonnes oeuvres" du CDH
Dans une interview donnée à la Dernière Heure, la présidente du cdH (centre démocrate humaniste - non, lecteur français, ce n'est pas une blague), Joëlle Milquet, ouvre en fanfare la nouvelle saison politico-démagogique.
En effet, espérant toujours accrocher son parti au wagon fédéral, la reine du néant sonore bat encore tous les records, puisqu’elle propose que le gouvernement aide financièrement les jeunes de leur naissance jusqu'à leur premier emploi. Et de proposer qu’un compte d’épargne soit ouvert au bénéfice des enfants d’allocataires sociaux en justifiant sa mesure comme suit : "Ce compte, bloqué, servirait à financer sa formation : des stages d'immersion linguistiques (sic), une remédiation extrascolaire, un minerval... Je veux, dès sa naissance, ôter de la tête de ses parents l'idée qu'une formation ne lui sera jamais accessible..."
Déjà, qui a dit que les enfants d’allocataires se destinaient nécessairement aux études supérieures (cf. l'allusion au minerval) ? Et s’ils suivent cette voie, sont-ils donc incapables de financer leurs études ? Surtout, ce dépôt d’argent, qui proviendra de l’impôt, se base sur un principe faux : il suppose qu’il est normal que des parents restent allocataires toute leur vie, ou du moins durant le temps que leur enfant reste à "leur" charge ! Milquet veut donc garantir une rente supplémentaire aux dépens du cochon de payant ! Elle souhaite, en d'autres termes, perpétuer le socialisme au nom de la "défense de la famille". Il est vrai aussi que ses cousins idéologiques socialistes sont très "famille"... au sens corléonesque du terme. Gageons qu’Elio aura compris le message.
Afin de nous convaincre de la grandeur de son idée, la Ségolène Royal bruxelloise assène : "C’est une politique sociale moderne !" Hélas, serions-nous tentés de conclure.
Numerus clausus
Cela fait à présent dix ans qu'un système de
numerus clausus est plus ou moins imposé dans les facultés de médecine belges. Comme le rappelle
la Libre Belgique, cela cause chaque année des problèmes non négligeables, et ce d'autant que les quotas sont accordés par université et non globalement. Mais passons sur les difficultés pratiques, et sur les rumeurs, colportées il y a quelques semaines par la Radio Télévision Bolchévique Francolâtre (RTBF), d'une pénurie de médecins généralistes qui commencerait à se faire sentir.
Bien que les difficultés pratiques ne soient pas négligeables, la critique de ce ce système de numerus clausus doit surtout se concentrer sur le raisonnement qui est à la base de son instauration. Tout d'abord, il s'agit d'une énième manifestation du refus des socialistes qui dirigent l'enseignement en Belgique francophone de reconnaître que les vertus de la planification sont un mythe, et un mythe dangereux. Plus de soixante ans après la parution de "The Road to Serfdom" de F.A. Hayek et plus de quinze ans après l'écroulement de l'empire soviétique, miné par les difficultés économiques et dont les citoyens eux-mêmes avaient élaboré de nombreuses blagues croustillantes sur la situation de pénurie permanente, ce refus d'accepter la vérité économique et historique serait risible s'il n'avait pas des conséquences désastreuses pour la société. Nos amis socialistes, toujours prompts à critiquer le prétendu aveuglement de ceux qui n'ont pas le bon goût d'être athées comme eux, feraient bien de se demander en quoi croire en l'existence d'un Etre Suprême serait plus ridicule que s'imaginer que le gouvernement est mieux à même que les individus de décider de quoi ils auront besoin, de quand ils en auront besoin, de comment le leur procurer et de qui se verra confier cette tâche et à quelles conditions.
Le numerus clausus, ce n'est rien d'autre qu'un nouvel (enfin pas tant que ça) avatar de la volonté planificatrice de nos édiles. Car, à bien y réfléchir, quel mal y aurait-il à ce que notre population compte trop de médecins ? Aucun, que du contraire. De toute manière, si l'offre de soins médicaux dépasse la demande, un ajustement aura lieu. Soit le prix de la consultation baisserait, ce qui serait la réponse classique si le marché était libre, soit, puisque l'INAMI contrôle le prix minimum de la consultation, certains médecins ne trouveraient pas leur compte dans l'exercice de leur activité et se retireraient purement et simplement du marché. Ou bien, mieux encore, ils émigreraient vers les pays où les médecins sont plus rares, permettant ainsi d'améliorer les conditions de vie dans les pays où leurs services seraient appréciés. Petit bonus pour la population : il est fort probable que le "tri" effectué par le marché permette en outre une sélection des médecins les plus performants.
En bref, donc, les conséquences d'une pléthore de médecins seraient de toute manière neutralisées par la réaction du marché. Inutile que le gouvernement ne s'en mêle comme il le fait depuis dix ans.
Vers une carte scolaire à la belge ?
Toujours sur le pied de guerre, Climax nous signale les projets du gouvernement communiste francophone dans le domaine de l’enseignement. L’un des points les plus inquiétants est la volonté d’établir une carte scolaire à la belge : les "bassins scolaires". Bien entendu, comme toujours, les faux-culs du WalSoc et leurs complices défendent ce projet totalitaire en faisant mine de vouloir préserver la liberté des individus, en l’occurrence "le libre choix des parents"...
Inutile de dire que, dans le cas où ce projet désastreux se concrétiserait, les mandataires et autres caciques seront les premiers à obtenir des dérogations pour envoyer leurs mouflets dans l’école de leur choix.
La guerre, c'est la paix
Bien entendu, l'Etat d'Israël est animé par sa volonté de paix... Comme le prouve
sa toute récente violation de la trève.
Mais tout le monde connaît le respect absolu que cet Etat accorde aux
résolutions internationales...
Le sens moral de la liberté
Etre libéral ou anarcho-capitaliste ne signifie pas que l’on approuve sans réserve n’importe quelle action pourvu qu’elle n’agresse pas autrui. Souscrire au libéralisme ne signifie pas applaudir à tout rompre au spectacle de drogués en pleine déchéance, mais plutôt se refuser à employer l’instrument de la loi pour empêcher quelqu’un de se détruire. Mon cher Constantin a justement dénoncé la tyrannie qui se cache derrière la volonté de faire le bonheur et le bien des gens malgré eux par le biais de la pénalisation de comportements aussi suicidaires. En revanche, il est parfaitement normal d’enguirlander le drogué pour lui faire prendre conscience qu’il est tombé bien bas au point de se transformer en loque humaine, avant de l’aider à se désintoxiquer.
Si la liberté se résumait simplement à "je fais ce que je veux et je vous emmerde", il est clair qu’elle ne vaudrait pas la peine que l’on s’y intéresse de plus près ni même qu’on la défende. Car le principe de liberté ne consiste pas à "faire ce que l’on veut", sinon la notion de crime et, plus généralement, de délit disparaîtrait. Nous ne devons pas confondre le plan politico-étatique et l’ordre juridique. Comme libertariens, nous refusons l’idée du "contrat social", mythe sans aucun fondement historique. L’autorité étatique est le fait d’une usurpation violente. Cependant, cela ne signifie nullement que nous rejetions l’idée d’une suprématie du Droit sur nos décisions. Au contraire, ajouterais-je. Personne n’a évidemment jamais signé de "contrat social" avec l’État (et c’est a fortiori vrai des générations successives), mais pour que le Droit gouverne nos existences et nos choix, il n’est nul besoin que celui-ci soit sanctionné par un vote unanime : nous sommes soumis à sa souveraineté abstraite. L’ordre juridique d’une société se fonde sur l’antériorité et la prééminence du Droit naturel, qui nous commande de ne pas attenter à la vie et aux biens d’innocents. Ce commandement n’a pas besoin d’être avalisé par une assemblée de citoyens pour être obéi ; nous lui devons obéissance, point à la ligne.
Il est évident que quelqu’un qui s’enfonce dans la consommation de stupéfiants ou dans l’alcoolisme n’a pas à être inquiété tant qu’il se contente de ruiner seulement sa propre santé. Mais la supériorité de la liberté réside dans sa dureté, non dans le laxisme moral : si le toxico persiste dans l’erreur et s’isole de toute vie sociale normale, il devra en assumer les conséquences et ne pas se chercher d’excuses (du style "c’est la faute à la bouteille et à la société"). L’une des caractéristiques essentielles du libéralisme est donc de faire coïncider comportement libre et devoir de responsabilité.
Ensuite, et surtout, grâce au libéralisme, nous pouvons atteindre des objectifs élevés : faire coexister des croyances diverses dans une même société (tolérance religieuse) ; contribuer au progrès des connaissances (concurrence scientifique) ; satisfaire les requêtes pacifiques de millions de clients (libre marché) ; pratiquer la charité pour aider les démunis et ceux qui souffrent (solidarité véritable), etc. En réalité, chaque être humain est doué de liberté, non pour vivre égoïstement en assouvissant simplement ses plaisirs immédiats, mais pour essayer d’accomplir des actions qui le hisseront à un degré éthique supérieur. Si la liberté n’est certes pas la Morale, elle est, cependant, bel et bien morale. C’est la seule fin politique digne de ce nom ; mais, sur le plan moral, elle est l’unique moyen pour arriver à des fins qui nous grandissent.
Je laisserai le mot de la fin au grand Lord Acton : "La liberté n'est pas un moyen pour une fin politique plus haute. Elle est la fin politique la plus haute. Ce n'est pas en vue de réaliser une bonne administration publique que la liberté est nécessaire, mais pour assurer la poursuite des buts les plus élevés de la société civile et de la vie privée."
Un despote supplémentaire mort dans son lit
Comme le dit l'éminent bloggueur : "Les dictateurs une fois chassés du pouvoir cherchent à tout prix à se faire oublier; ne faisons pas à Stroessner ce cadeau posthume."
Faut-il rire ou pleurer ?
Si certains se mettent à douter de
l'existence même du complot terroriste récemment déjoué par les services secrets britanniques, les conséquences de cet événement n'ont, elles, rien d'imaginaire. Une fois de plus, il s'agit de se servir de l'événement pour légitimer de nouvelles atteintes aux droits des individus.
S'il faut en croire les journalistes de "La Libre Belgique", les
nouveaux projets liberticides européens ont pourtant été présentés avec une petite dose de surréalisme qui ne manque pas de sel. Voici un extrait des propos tenus par Franco Frattini, le commissaire européen à la Sécurité :
"On ne peut pas laisser (les terroristes) gagner la guerre sur nos valeurs européennes. Nous devons surveiller plus attentivement Internet pour pouvoir agir de manière plus efficace et nous devons établir des plans pour Europol afin de surveiller les armes et le matériel permettant de fabriquer des bombes"
Que faut-il en déduire : que le droit des individus à la liberté ne fait pas partie des valeurs européennes, qu'il en fait partie mais que nos édiles veulent rendre clair qu'ils se soucient des libertés individuelles comme de leur premier décret, ou bien que les hommes de l'Etat sont stupides au point d'arriver à se contredire en seulement deux phrases ? Quelle que soit la réponse à cette question, une chose est sûre : les droits des individus continueront à l'avenir à être bafoués. J'aimerais pouvoir finir sur une phrase bien sentencieuse comme "s'il en est ainsi, les terroristes ont déjà gagné leur guerre". Malheureusement, il n'a pas fallu attendre la franchise internationale Al Quaeda pour que les hommes de l'Etat bondissent sur le moindre prétexte leur permettant de justifier de nouvelles atteintes aux droits des personnes. Ce sont les citoyens complaisants qui les élisent, et qui vont même jusqu'à leur demander d'être privés de plus de libertés, qui sont les artisans de leur propre servitude.
Cette conclusion me remet en mémoire les mots de Benjamin Franklin :
"Those who would give up Essential Liberty to purchase a little Temporary Safety, deserve neither Liberty nor Safety.".
L’État-marteau
Les gouvernements se frottent les mains : quelle divine surprise pour eux que cet attentat (réel ou supposé, des doutes solides existent) qui a été déjoué la semaine dernière ! En clouant au sol des milliers de passagers, ils ont ainsi pu se livrer à une démonstration de force spectaculaire, révélant la vraie nature des États : contrôler, intimider et harceler des innocents comme autant de présumés coupables. Chacun est désormais un suspect potentiel... pour le plus grand bien des citoyens ! Il suffit désormais d’être claustrophobe pour être soupçonné d’avoir quelque accointance avec des terroristes.
Et rien ne nous dit que cela s’arrêtera en si bon chemin. Déjà, le profilage ethnique et religieux repointe sa vilaine trogne, censément pour accélérer le filtrage des passagers - nos maîtres sont décidément trop généreux... Il faudrait presque les remercier de diminuer certaines restrictions concernant les objets qu’un passager peut garder avec lui (ex : pendant une semaine, aucun livre n’était permis à bord ; maintenant, c’est un livre maximum disposé dans un sac en plastique). Il est évident que cette magnanimité est toute provisoire, car les interdictions ne vont aller qu’en augmentant.
Il est d’ailleurs utile de se souvenir que ce n’est pas grâce à des mesures de sécurité aéroportuaires, déjà serrées, que les suspects ont été arrêtés. C’est le Pakistan qui a informé les services américains et britanniques ! Quand on connaît les méthodes d’interrogatoire employées par cet État-super voyou (mais allié des USA...), le scepticisme est plutôt de mise sur la qualité des renseignements livrés.
Et si, dans le fond, le projet des gouvernements était de dégoûter les individus de voyager, à dessein de les enfermer dans leur propre territoire pour les surveiller plus efficacement ? L’État est un marteau qui crucifie ses sujets en leur enfonçant les clous rouillées de la servitude au nom de "l'intérêt général". L’hypothèse ne me paraît pas spécialement fantaisiste.
PS : sur le même thème, je vous recommande ce billet décapant de mon ami h16.
Surplus: pénurie d'alternatives?
We cannot let the terrorists achieve the objective of frightening our nation to the point where we don't -- where we don't conduct business, where people don't shop.
George W. Bush, le 11 octobre 2001.
C'est sur cet extrait choc d'un discours[1] de Georges Bush que démarre presque Surplus[2], un documentaire suédois de 2003 dont le thème -la surconsommation dans nos sociétés développées- est bien souligné par le second titre: "Terrorized Into Being Consumers".
Documentaire ne semble pas être le terme adéquat. Dans la forme, il s'agit plutôt d'un clip entraînant de 50 minutes, dans lequel se succèdent à un rythme élevé images chocs, brèves interview ou extraits de discours, le tout sur fond de musique plutôt électronique. La musique est omniprésente, mais le montage audio fait aussi appel à diverses techniques: répétition d'un ou de plusieurs mots, faux doublage, découpage et réassemblage de mots pour former de nouvelles phrases, etc. Sur le fond, Surplus se contente généralement de stimuler les sentiments du spectateur, en restant en surface et en servant un discours confus, parfois même paradoxal. Le résultat final, ne peut selon moi qu'abandonner toute prétention documentaire voire simplement informative (oui je sais je suis dur, mais après tout il n'y a rien de mal à réaliser un clip impressionniste de 50 minutes).
La première partie présente un certain "système" comme responsable de tous les maux de la Terre. Sur fond d'images éculées de rassemblement policier en marge d'un sommet quelconque (Seattle, Gênes,...), une voix off résume en un mélange tout aussi attendu tous les maux de notre monde: guerres, pétrole, uniformisation des goûts et des produits, surconsommation, dette, pauvreté, sous-développement,... Le constat est tellement large qu'il impute tous les problèmes du monde au "système" et en devient presque une lapalissade. Néanmoins, cette introduction, que je trouve simpliste et réductrice nous fait immédiatement comprendre deux choses: le lieu idéologique d'où l'auteur parle et à qui il s'adresse. A mort le capitalisme et l'ultralibéralisme. Ou bien n'est-ce qu'une apparence?
La deuxième partie aborde un peu plus précisément le thème de la surconsommation. Le réalisateur pointe quelques exemples de consommation excessive et de gaspillage, enchaînant images de chariots de supermarché et de décharges. Il égratigne aussi le discours choquant (citation de George Bush au début de ce billet) ou simplement ambigu des Etats, de leur politique de relance de la consommation et de l'apologie de la croissance. Mais là encore, le capitalisme, ou tout au moins le libéralisme, aurait mérité une défense en bonne et due forme. La croissance comme credo (je croîs donc je crois?) et l'illusion de la relance étatique ne sont pas des chevaux de bataille libéraux, bien au contraire[3].
La situation s'aggrave cependant lorsque le réalisateur fait mine de présenter une alternative. L'analyse va rarement jusqu'à proposer des solutions, mais ce qui se rapproche le plus d'une thèse à opposer à la croissance, c'est le discours de John Zerzan[4], présenté par bribes tout au long du documentaire.
Le premier aperçu de la pensée de Zerzan concerne la violence. Revenant sur les affrontements et le vandalisme ayant eu lieu en marge des mouvements "alters", on voit John Zerzan soutenir que les destructions de propriétés privées sont un passage légitime voire obligé pour changer le système. On est loin d'un gentil discours démocratique: il s'agit bien de tout détruire, puisqu'on ne peut se faire entendre d'une autre manière.
Tant sur le fond que sur le plan de la stratégie, un discours légitimant aussi rapidement la violence a toutes les chances de ne convaincre personne, pas même dans les mouvements altermondialistes qui soutiennent généralement l'idéal démocratique. Cela donne d'ailleurs lieu a une séquence aussi paradoxale qu'ironique: un extrait de discours dans lequel Berlusconi lui-même relativise les violences de Gênes en les attribuant à une minorité des manifestants présents.
A noter qu'il n'y a souvent qu'un pas entre légitimer la violence matérielle et la violence contre les personnes, comme en témoigne la relation et la position ambiguë de John Zerzan vis-à-vis d'Unabomber[5].
Le deuxième aperçu des thèses de Zerzan concerne le coeur de sa pensé, l'anarcho-primitivisme[6]. A nouveau, en choisissant de mettre en exergue un discours extrême, le réalisateur semble se moquer de nous. On voit tout d'abord John Zerzan nous vanter les mérites de la pré antiquité, lorsque "les hommes ont vécu en paix pendant deux millions d'années". Comme si le scepticisme provoqué par une telle affirmation ne suffisait pas, on nous montre alors un drôle d'homme des cavernes faisant rouler une pierre sur un bout de bois... Voilà qui achève d'enlever tout crédit à cette option de décroissance absolue.
N'y a t il point de salut entre ces deux extrêmes? Le film nous entraîne brièvement à Cuba. Mais là encore, après une rapide présentation de l'idéal socialiste, nous découvrons la carte de rationnement (ne pouvons-nous donc pas volontairement consommer moins?) et une surréaliste marque unique de dentifrice. Marque, c'est beaucoup dire puisque le tube est entièrement blanc, sans aucune indication. "Tout le monde sait ce que c'est, plus besoin de l'écrire dessus!" nous dit une vieille cubaine malicieuse (son sourire nous faisant douter de l'efficacité de ce dentifrice unique). La séquence s'achève sur un rap construit avec des extraits d'interviews de cubains sur leur régime alimentaire: rice & beans, rice & beans... beans & rice...
Hormis les astucieux artifices de montage et l'utilisation judicieuse de la musique, que conclure? Si la première moitié du film, rapide et entraînante séduira un certain camp, elle pêche cependant par son simplisme et sa banalité. La seconde moitié échoue à nous proposer des alternatives convaincantes. Elle le fait cependant non sans humour et avec un tel second degré que je soupçonne le réalisateur de Surplus d'avoir voulu tendre un piège aux adeptes de la pensée express. Conclusion: A consommer pour vous faire votre opinion...
In the 1960's there was a young man that graduated from the University of Michigan. Did some brilliant work in mathematics. Specifically bounded harmonic functions. Then he went on to Berkeley. He was assistant professor. Showed amazing potential. Then he moved to Montana, and blew the competition away.
Gerard: Yeah, so who was he?
Sean: Ted Kaczynski.
Gerard: Haven't heard of him.
Sean: Hey, Timmy!
Tim: Yo.
Sean: Who's Ted Kaczynski?
Tim: Unabomber.[7]
[1] George W. Bush, discours du 11 octobre 2001,White House (EN)
[2] Surplus: Terrorized Into Being Consumers, Wikipedia (EN)
[3] La vieille lubie de la relance de la consommation, Jean-Louis Caccomo, le Québécois Libre (FR)
[4] John Zerzan, Wikipedia (EN)
[5] John Zerzan and the Unabomber, Wikipedia (EN)
[6] Anarcho-primitivism, Wikipedia (EN)
[7] Good Will Hunting, IMDB (EN)
Théorie du complot
Dieu sait si je me méfie comme de la peste des théories du complot, qu'il s'agisse du complot américano-sioniste cher aux pro-palestiniens, du complot militaro-pétrolier popularisé par Michaël Moore ou encore de ce bon vieux complot judéo-maçonnique cher à Jean-Marie Le Pen. Dans la majeure partie des cas, il ne s'agit que d'élucubrations plus ou moins fantaisistes - j'ai eu vent d'une théorie selon laquelle les "traces" des avions ne seraient pas des résidus de combustion du kérozène mais des produits pulvérisés par les avions pour contrôler la météo - servant ou non un but politique. Rien de bien intéressant, ni de bien neuf, en somme.
Mais quand est arrivée l'annonce de ce "super-attentat" déjoué par les services secrets britanniques et américains, je n'ai pu m'empêcher de douter. Qu'un tel complot soit découvert au moment où Blair a du plomb dans l'aile et où la "Guerre contre la Terreur" ne fait plus recette aux Etats-Unis (depuis la défaite de Lieberman contre un illustre inconnu aux primaires du parti Démocrate dans le Connecticut) me paraît douteux. Qu'il soit découvert "in extremis", mais que les détails (notamment le nombre de vols et de compagnies aériennes visées) restent flous m'interpelle. Que moins d'une semaine après la découverte du complot le Royaume-Uni baisse son seuil d'alerte ne fait que confirmer mes doutes. Mais bon, je n'aime pas les théories du complot, et imaginer Bush et Blair complotant allègrement ne m'interpelle guère.
Mais voilà, ce matin mon excellent ami Ronnie m'a fait parvenir le lien vers un
article troublant paru sur le blog de Craig Murray, un ancien ambassadeur britannique en Ouzbékistan. Et là, je commence à gamberger sérieusement.
Le musée des horreurs de la gauche, épisode 6
La "révolution des oeillets" : quand une dictature change de couleur politique
Une vache sacrée contemporaine est la célèbre "révolution des oeillets", qui renversa le pouvoir salazariste en 1974. Généralement, elle est présentée comme un grand moment de la liberté en Europe. En vérité, cet événement a fait passer une dictature de droite à la gauche de la Grande-Bretagne travailliste d’alors, ce qui n’est pas peu dire. Car le putsch des joviaux militaires "progressistes" lusitaniens était en réalité téléguidé par le parti communiste, en la personne d’Alvaro Cunhal. Celui-ci revint, au demeurant, rapidement d’exil... qu’il avait passé non seulement en France, mais surtout en URSS - patrie d’adoption où il avait sans doute passé beaucoup de temps à méditer sur les vertus présumées du "centralisme démocratique" comme remède à la dictature conservatrice en vigueur dans son pays natal...
Après leur victoire, les militaires créèrent un "comité révolutionnaire de salut national" visant à imposer le diktat marxiste aux autres partis. Bien évidemment, ils accusèrent les grincheux qui osaient contester leurs objectifs d’être des séditieux, des fascistes et des nostalgiques de la PIDE (police politique de Salazar, dont les archives servirent ensuite aux putschistes d’extrême gauche pour contrôler la population). Les bolcheviques sont décidément d’un prévisible ! Par une étrange coïncidence, les anciennes colonies - le Mozambique et l’Angola - furent quasiment au même moment livrées aux factions marxistes...
Certes, quelques années plus tard, en 1979, c’est un parti de centre-droit qui gagna les élections. Mais, entre-temps, une Constitution flambant neuve avait été adoptée. Elle vaut la peine d’être examinée pour apprécier le caractère "libéral" de la jeune démocratie portugaise d’il y a trente ans.
En dehors des droits civils et politiques énoncés classiquement dans à peu près n’importe quelle Constitution, nous trouvons dans la première partie, un titre III, les "droits et devoirs économiques, sociaux et culturels", qui énumère les poncifs habituels : "droit au travail" (appuyé par des politiques de chômage, pardon, de "plein-emploi"...) ; le salaire minimum ; la "sécurité sociale" (gérée privativement, mais contrôlée par les sbires de l’Etat) ; le "droit à la santé" et la socialisation des coûts médicaux ; politiques de prévention pour tout et rien ; "droit au logement" (avec même des privilèges accordés à "la jeunesse"). On trouve aussi une intrusion de l’Etat dans la famille, au moyen du planning familial visant à apporter les lumières socialo-bolcheviques au populo ignare et obscurantiste...
Concernant la culture, l’Etat se prévalait, naturellement, de dé-mo-cra-ti-ser ; en d’autres termes de s’approprier les médias et supports culturels. C’est un fait oublié, mais le gouvernement portugais a continué pendant longtemps de nommer les directeurs de journaux !
Mais là où cela devient encore plus intéressant, c’est lorsque la Constitution de 1976 aborde les questions économiques. Cette attention particulière du constituant lusitanien montre combien régnait le primat marxiste, car ce n’est normalement pas le rôle de la Loi fondamentale de traiter les affaires économiques. L’article 80 dispose ainsi que le "pouvoir économique est subordonné au pouvoir politique", de même que l’organisation économique du pays repose sur "la propriété publique des ressources naturelles et des moyens de production". Difficile d’être plus clair... Ensuite, comme au temps de l'Estado Novo, le corporatisme syndical et patronal est coulé dans le bronze constitutionnel. La liberté d’entreprise est concédée, me dira-t-on... mais d’abord, elle s’inscrit dans un cadre d’économie mixte, et ensuite comment aurait-elle pu être assurée véritablement alors que tout le reste contredisait ce principe (cf. par exemple la "planification démocratique du développement économique et social") ?
Dans la même veine, le pouvoir se proposait de gommer les différences entre vie urbaine et vie citadine. Fort heureusement pour les Portugais, il n’a pas eu le temps de recourir aux méthodes utilisées à la même époque par les communistes cambodgiens. Néanmoins, l’agriculture fut collectivisée, et les banques subirent les nationalisations (on comprend le grand intérêt que Mitterrand porta à l’expérience portugaise).
Quant aux éventuelles révisions constitutionnelles, elles ne pouvaient remettre en cause le laïcisme en vigueur, le caractère républicain de l’Etat, ni les planifications économiques décidées. Notons à l’inverse que, lorsqu’il s’est agi, au cours du XXe siècle, de trahir le caractère réellement libéral de plusieurs constitutions, les socialistes et leurs alliés ne se sont jamais embarrassés de scrupules juridiques. Pour les "progressistes", la Loi fondamentale ne doit être inamovible que si elle ordonne la collectivisation des terres et des nationalisations à tout va.
Le putsch militaire de 1974 et la Constitution portugaise de 1976 : un exemple de plus que la gauche et l’état de droit ne font vraiment pas bon ménage.
Sécurité sociale
Sur son blog, Jean-Louis Caccomo nous rappelle quelques
vérités sur la Sécu.
Le retour de l'eurocommunisme
Ce n’est pas un scoop, mais il est toujours bon de le rappeler : le communisme maintient encore et toujours son joug terrifiant et mortifère sur les Nord-Coréens et les Cubains. Sans doute guidés par un sentiment de solidarité avec ces régimes odieux, nombre d’États européens sont en voie de totalitarisation avancée. Car, contrairement à la ritournelle partageuse, l’Union européenne n’est pas cette institution "néo-ultra-giga-mégalibérale". J’en veux pour preuve l’existence d’une institution peu connue, mais qui repose sur des bases on ne peut plus inquiétantes : le RETIS.
Qu’est-ce que c’est donc que cette bestiole ? Accrochez-vous, cet acronyme mystérieux signifie : "Réseau européen transrégional pour l’inclusion sociale". Il s’agit d’une organisation réunissant les régions européennes, et dont le programme consiste à promouvoir des politiques ultrasocialistes. En effet, les objectifs affichés sont les suivants : "éradiquer la pauvreté, oeuvrer à la liberté, l’égalité en dignité en droit et en fait, ainsi qu’à l’émancipation sociale de chaque femme et chaque homme". En clair, cela signifie que l’égalitarisme et la spoliation trouvent ici un laboratoire orwellien des plus accueillants.
Ce programme d’inclusion englobe donc les villes et régions européennes en les invitant à s’inspirer des acquis, non du Gosplan, mais presque, puisqu’il s’agit de la "Méthode ouverte de Coordination". Et ce, afin de soutenir la planification urbaine et rurale. Nous pouvons aussi découvrir que, tous les deux ans, les Etats membres doivent remettre un rapport au Politburo, analysant l’évolution de chaque "Plan national pour l’inclusion sociale".
Non contents de vouloir détruire ce qui subsiste de notre maigre liberté, les supporters du communisme transrégional veulent éclairer de leurs lumières les pays entrants, comme si ceux-ci n’avaient pas, pour la plupart, enduré les désastres du marxisme le plus cruel. Amnésie volontaire et indécence idéologique communient en l’occurrence dans une sorte de messe noire collectiviste.
"L’inclusion sociale ?" Ce n’est rien d’autre que la nouvelle forteresse arrogante du socialisme européen.
Le clientélisme en chiffres
Une remarque en passant : le caractère non rémunéré de beaucoup de mandats ne doit pas faire illusion; ils servent en effet à se constituer une clientèle électorale.
Citation
Dans mon billet paru hier, j'ai cité quelques mots de Mme de Staël. Aujourd'hui, je me contenterai de rappeler ces quelques lignes de Benjamin Constant :
"L'on peut trouver des motifs d'utilité pour tous les commandements et pour toutes les prohibitions. Défendre aux citoyens de sortir de leurs maisons serait utile ; car on empêcherait ainsi tous les délits qui se commettent sur les grandes routes. Obliger chacun de se présenter tous les matins devant les magistrats serait utile ; car on découvrirait plus facilement les vagabonds et les brigands qui se cachent pour les occasions de faire le mal. C'est avec cette logique qu'on avait transformé il y a vingt ans la France en un vaste cachot." (Commentaire sur l'ouvrage de Filangieri, 1re partie, chap. IX "Des erreurs en législation")
L'interêt et la morale
En règle générale, l’argumentaire libéral adopté par nombre d’entre nous vise à faire comprendre au grand public quel est son intérêt à adopter les principes de liberté. Ce discours vise à le convaincre qu’en se débarrassant de l’étatisme, et en particulier du socialisme, il vivra mieux. L’idée-force sur laquelle repose cette méthode est que l’étatisme s’appuie sur l’ignorance de la majorité des gens (sans compter que le libéralisme ne promet pas le bonheur, mais la liberté de le chercher). Cette stratégie, pour sincère qu’elle soit, me semble vouée à l’échec.
En effet, en ce début de XXIe siècle, qui ignore les méfaits du socialisme et de ses incarnations les plus totalitaires que furent le communisme et le nazisme ? Le siècle passé fut celui de l’État, projet auquel aspirait Mussolini (ancien instituteur de gauche) ; je crains que le nôtre ne soit pas encore disposé à changer de trajectoire. Sans sombrer dans d’aussi abjectes horreurs que les régimes précités, nos pays continuent de sacrifier à ce culte de l’omnipotence étatique. D’où les sempiternelles jérémiades anti-mondialisation - étant donné que nos gouvernants estiment qu’ils n’ont jamais assez de pouvoir ni de richesses à confisquer.
D’autre part, pour parler de nos contrées, les malversations socialistes défrayent la chronique judiciaire, mais le bon peuple vote encore et toujours pour les mêmes malfrats. Pourquoi ? Est-ce parce que ces électeurs sont stupides et ignorent "qu’il en va de leur intérêt" de refuser leurs voix à des mafieux ? C’est tout le contraire : ils votent pour ceux qui leur promettent le plus de sinécures et/ou d’allocations. C’est d’ailleurs vrai pour les autres formations : les "Réformateurs" misant de leur côté sur un socialisme de classes moyennes et sur une politique "petit blanc". Le problème de l’électorat MR, c’est tout simplement qu’il est un électorat - donc un public tenté par l’envie et la prédation, comme toutes les autres factions. Si nous vivons dans une société de despotes collectivistes, ce n’est pas parce que des malfaisants sont tombés du ciel un jour de malchance, mais plus prosaïquement parce qu’ils ont été élus. Les alimentaires se retrouvent en réalité des deux côtés de l’isoloir (j’allais écrire : du miroir) : l’électeur et le candidat. La tyrannie est celle de l’estomac ; faut-il s’en étonner puisque le paradigme de tout État socialiste est le matérialisme ?
Il y a deux cents ans, Mme de Staël, qui n’était certes pas un bas-bleu, écrivit des lignes ô combien prémonitoires, alors qu’elle s’opposait courageusement à Bonaparte : "Un pays ne peut être gouverné longtemps par des scélérats, mais très longtemps par des demi-honnêtes gens, et c'est l'espèce la plus recherchée comme instrument par les factieux ardents et tyranniques."
Le combat libéral ne peut donc, à mon sens, faire confiance à "l’intérêt bien compris" des particuliers, mais doit au contraire invoquer la justice et l’aspect moral de la pensée politique qui l’anime : justice pour ceux qui se font spolier et à qui les étatistes demandent de ne pas gueuler afin de ne pas trop perturber leur digestion et leur confort ; et aspect moral afin de rappeler d’abord que le socialisme détruit toute dignité humaine et ensuite qu’il importe aux libéraux de la restaurer.
Quand la politique de proximité jargonne
Un fidèle lecteur m’a fait connaître un site presque aussi ébouriffant que celui d’Eric Sax, il s’agit de celui de Gregor Chapelle, candidat PS à Forest. Ancien président de la FEF (Fédération des étudiants francophones, le tremplin-carrière de la gauche caviar en Belgique francophone), Chapelle voudrait, semble-t-il, devenir le Raymond Devos du socialisme bruxellois ; du moins, si j’en crois le nom de son association : Oxyjeunes/Hydrojeunes. Cependant, il est plus convaincant dans le registre 1789 : le voilà qui s’est décerné le titre envié d’Allié des Citoyens, rien que ça ! Mais que nous veut donc l’Ami du Peuple 6.0 ?
Son programme est évidemment à la hauteur de ce titre ronflant dont il s’est paré : lutte contre l’insécurité, contre la saleté, pour la convivialité. Rien que de l’inédit. On peut même parler d’un programme allant à contre-courant, tant nombre de citoyens rêvent de rues jonchées d’immondices, de criminalité impunie, de rixes perpétuelles et autres émeutes urbaines. De l’audace, toujours de l’audace, comme disait l’autre. Et bien sûr, comme tout bon socialiste, il a son plan de lutte active et citoyenne contre le chômage : ce phénomène disparaîtra si l’on promeut les secteurs parasitaires, pardon, "l’économie sociale"...
D’ailleurs, en lisant son programme dans le détail, on trouve des formules singulières. Ainsi, pour l’environnement, nous apprenons qu’il "se dégrade tous les jours et menace notre santé". Fichtre, nos socialistes vont-ils proposer un Plan quinquennal de lutte contre l’Environnement menaçant ? D’ailleurs, nous y découvrons que "nous empruntons la biosphère à nos enfants", mais l’histoire ne précise guère si c’est avec ou sans les intérêts (ni leur pourcentage éventuel). Et Gregor de rasséréner ses lecteurs (qui se demandent sans doute de quoi on leur cause) sur le ton d’un sergent-recruteur servant un dernier coup à de pauvres diables ignorant ce qui les attend : "Je serai votre allié dans ce combat". Une fois élu, va-t-il donc se pointer avec un fusil et secondé par la maréchaussée pour sommer d’honnêtes pères de famille de rendre l’air qu’ils ont chipé avec fourberie à leur progéniture ?
Quant à l’insécurité, la solution est toute trouvée : il faut... il faut... Re-ti-sser du lien social, voyons ! Mais surtout, innovation torride : "générer des solidarités chaudes." Le PS forestois va donc promouvoir l’ouverture de boîtes échangistes ? Les socialistes pour le libre-échange, ce serait une première à saluer ! Ceci dit, ne rêvons pas sur la réalité calorifique du projet : le titre du dernier bouquin de l’intéressé ne s’appelle pas pour rien : "Chaud devant ! Construire une gauche offensive" (sous-entendu : "méchants ultralibéraux, gare à vos miches").
Mais le plus beau, cela reste le thème de la propreté. Supposant sans doute que ses concitoyens aiment se vautrer dans la crasse, l’audacieux Gregor envisage une action d’une ampleur inouïe jusqu'à aujourd’hui : des fêtes de la propreté, afin de rappeler le populo à ses devoirs hygiéniques élémentaires. Ces majestueuses bacchanales étant financées par l’impôt, faudra-t-il un jour s’écrier : "la propreté, c’est le vol" ?
Le droit : opposé au fait accompli
Dans les réactions à l’agression israélienne au Liban, j’en entends ou lis une, assez fréquente, qui m’agace tout particulièrement : ce sont les personnes qui haussent les épaules au motif que, de toute façon, dans un conflit tout est permis, que les deux parties ont tort et manipulent les faits. Tout d’abord, j’aimerais faire remarquer que, par définition, quand un État bombarde des civils (en l’occurrence, après avoir violé, de manière récurrente, l’espace aérien du pays qu’il attaque), il y a forcément des coupables et des victimes.
Pour brouiller les pistes, certains vous rétorqueront alors que ces dernières ne sont peut-être pas si irréprochables que cela, de la même manière que l’atomisation d’Hiroshima fut justifiée par la "responsabilité collective" (concept monstrueux s’il en est) des Japonais. Quand on veut noyer son chien, on l’accuse de la rage. Sans oublier que ce détestable argument est réversible. D’ailleurs, il est employé à son tour par le Hezbollah pour excuser ses ripostes contre des villes israéliennes, alors que les civils y résidant et travaillant ne sont pour rien dans le drame enduré par leurs voisins libanais, victimes en la circonstance du seul État hébreu - comme le note Ken Roth d’Human Rights Watch.
Plus généralement, une guerre n’est pas une fatalité, ni une catastrophe naturelle ; elle est déclenchée par des individus. À ce titre, ceux-ci doivent rendre des comptes et ne pas se croire au-dessus des lois simplement parce qu’ils se déclarent "gouvernement de la nation" et "représentants du peuple". Quand les Etats-nations se constituèrent, une réflexion très riche émanant de théologiens et de juristes, tels que Vitoria, Suarez et Grotius, se développa : ces auteurs donnèrent naissance au droit international public. Partant du constat que les États étaient (et sont encore, évidemment) des puissances souveraines, il fallait leur donner des limites et empêcher leurs gouvernants de se croire autorisés à agir n’importe comment sous prétexte de l’existence d’une situation belliqueuse.
Qu’il s’agisse du droit des neutres, de la liberté de commercer (sur les mers, notamment), de la proportionnalité des ripostes, il s’agissait de confiner sévèrement les États dans leurs limites. Un des principes fondamentaux était qu’aucune armée belligérante n’était légitimée à s’en prendre à des parties extérieures au conflit, et donc à de paisibles civils. Cette distinction rigoureuse entre civils et puissances hostiles fut fortement mise à mal par notre époque démocratique : puisque la démocratie était censée reposer sur la "souveraineté du peuple", le "peuple" devait désormais être tenu pour solidaire des actions du gouvernement supposé en émaner - pour le meilleur et pour le pire. C’est toujours sur ce raisonnement fallacieux que sont assises la plupart des actions gouvernementales. Dès lors, la population tout entière est devenue de la simple chair à canon ou, au mieux, un gigantesque bouclier humain servant de protection aux irresponsables qui régissent les citoyens.
Surtout, la démocratie étant à présent décrite comme la fin de l’Histoire et l’accomplissement de la raison universelle (pour parler le sabir hégélo-fukuyamien), tout semble permis à ses représentants qui couvrent leurs multiples et sanglantes turpitudes en accusant leurs détracteurs de traîtrise et de complicité avec "les ennemis de la nation et du monde libre".
Mais le droit se moque des prétextes idéologiques invoqués, il est là pour sanctionner les fautes commises, pas pour entériner le fait accompli. Des crimes de guerre commis au nom de la démocratie restent des crimes de guerre. Faut-il, du reste, être surpris que le bolchevisme juridique consistant à changer le sens des mots pour les faire cadrer avec sa propre politique soit si prisé par certain gouvernement ?
Enfin, il est souvent répliqué en guise d’argument ultime : "Tout cela est bel et bon, mais vos beaux principes ne seront jamais respectés." Peut-être, et même sûrement tant qu’il existera des États. Mais, tant qu’ils seront en place, leurs chefs ne doivent pas se croire au-dessus des lois. Oublier de le leur rappeler, c’est s’en faire les complices impavides. Au demeurant, avec ce type d’argutie, les auteurs de délits de droit commun peuvent également dormir sur leurs deux oreilles, puisqu’il est certain que le crime existera toujours. Ajoutons que si le Droit était toujours respecté, il perdrait sa raison d’être, ou plutôt il se confondrait avec chacun de nos actes. Raisonnablement, nous pouvons parier sans risque qu’il n’en sera jamais ainsi.
En tant que libéraux et libertariens, n’oublions donc jamais que l’état de fait n’est souvent que l’arme de destruction idéologique massive des criminels et donc des gouvernements, par nature peu soucieux de l’état de Droit.
Clientélisme impénitent
Ce n’est pas parce que c’est l’été que les habituelles pratiques politiciennes se sont arrêtées. Climax jette, à cet égard, un éclairage salutaire sur le Caliméro du PS, Jean-Pierre De Clercq. En effet, celui-ci se vautre dans le clientélisme le plus éhonté sur son site web, en invitant les chômeurs à le contacter pour obtenir leur passeport socialiste pour l’emploi. Et le plus naturellement du monde, de surcroît !
C’est bien le signe de l’impunité dont bénéficie largement cette pratique devenue indissociable d’un mandat politique.
Le musée des horreurs de la gauche, épisode 5
La voie chilienne vers le totalitarisme
Parmi les mythes constitutifs de la doxa socialiste contemporaine, Salvador Allende figure en bonne place. Bien que ses méfaits soient connus, le président socialiste reste une sorte d’idole médiatique intouchable.
Rappelons d’abord qu’ayant recueilli seulement 36,2% des voix, c’est par la voie du Congrès que le chef de l’Unité populaire se vit remettre le pouvoir présidentiel. Il était traditionnel au Chili que soient ainsi départagés les deux candidats ayant obtenu le plus de voix. Pourtant, devenu président de la République, Allende agit d’emblée comme s’il avait reçu carte blanche pour humilier et spolier la majorité des Chiliens, tel le chef d’une bande de pillards autrement dit.
Certes, ce n’est pas lui qui avait initialement conduit le pays en direction du socialisme. Ses prédécesseurs - en particulier, le démocrate-chrétien Eduardo Frei, qui se racheta par la suite en risquant sa vie comme principal opposant à Allende - avaient déjà lancé des plans de réforme agraire, entraînant des occupations de fermes par des agitateurs de gauche et de nombreuses expulsions de propriétaires légitimes. Mais les socialistes estimaient que ce n’était pas encore assez à leur goût : dès les années 60, ils avaient opté pour une stratégie de conquête du pouvoir bolchevique et de subversion intégrale de la société chilienne. Lors du congrès socialiste de Linares en octobre 1965, la motion suivante fut adoptée :
"Notre stratégie rejette dans les faits la voie électorale comme moyen de conquérir le pouvoir. (...) Le parti a un objectif : afin d’obtenir le pouvoir, le parti doit utiliser toutes les méthodes et tous les moyens que requiert la lutte révolutionnaire."
Deux ans après, devant des délégués socialistes et communistes venus du monde entier, le parti socialiste chilien adopta une résolution encore plus claire sur ses intentions :
"La violence révolutionnaire est inévitable et légitime. Elle constitue la seule route vers la pouvoir politique et économique, et sa seule défense et force. C’est uniquement en détruisant l’appareil militaro-démocratique de l’État bourgeois que la révolution socialiste peut s’enraciner. Les expressions pacifiques et légales du combat ne peuvent, en elles-mêmes, conduire à conquérir le pouvoir. Le parti socialiste les considère comme des instruments d’action limités, des parties d’un processus politique qui nous conduit à la lutte armée. Le programme politique du front des travailleurs est poursuivi et contenu dans celui de l’Organisation de solidarité latino-américaine (l'OLAS - NB : organisation de subversion pro-communiste alors présidée par Allende), qui reflète la nouvelle dimension - armée au plan continental - du processus révolutionnaire latino-américain."
Dès lors, faut-il s’étonner qu’en 1970, Allende se soit écrié, avec des accents homicides digne de son camarade Castro : "Santiago sera repeint en rouge sang si je ne suis pas confirmé comme président." ? Le marxisme constituait depuis longtemps l’idéologie d’Allende ; ce n’est pas un hasard si, en 1953, il était parti à Moscou pour rendre un dernier hommage à Staline. De plus, il semble avoir été un agent de liaison du KGB dès cette époque.
Une fois arrivé au pouvoir, Allende se distingua par de constantes et méthodiques violations des règles constitutionnelles - que la Cour suprême dénonça comme il se devait, mais en vain (pour un marxiste, les lois doivent se mettre au service de la révolution et du "sens de l’Histoire").
D’emblée, la justice tomba sous la coupe réglée du pouvoir révolutionnaire. De nouveaux hauts-fonctionnaires furent nommés de manière anticonstitutionnelle afin de faciliter les nationalisations des secteurs industriels et bancaires. Le gouvernement s’attaqua ensuite à la presse d’opposition, en emprisonnant les journalistes récalcitrants et en faisant fermer leur rédaction. C’est aussi à dessein de contrôler l’opinion et d’empêcher l’expression de la moindre opposition qu’Allende décida de monopoliser la production et la distribution du papier et de brouiller les ondes des chaînes qui n’avaient pas l’heur de lui convenir - notamment les stations universitaires. L’enseignement tomba également dans les filets collectivistes lorsque le gouvernement promulgua le "décret de démocratisation de l’enseignement", servant en réalité à rendre obligatoire dans les écoles la diffusion du catéchisme marxiste.
De plus, bien avant Pinochet, c’est Allende qui a brutalement institué l’emploi de la torture, afin de mater quiconque lui manifestait une résistance trop active. Des hommes du régime faisaient également régner la terreur chez les propriétaires fonciers qui n’avaient pas encore été expropriés, tandis que des syndicalistes aux ordres faisaient appliquer les diktats socialistes dans les usines. Les rues furent vite à la merci de milices stipendiées par les hommes d’Allende aux fins de mater toute contestation "bourgeoise". Rappelons aussi que, trente ans avant le Venezuela et la Bolivie, le Chili était devenu un satellite cubain, que Castro venait fouler du pied tel un conquistador victorieux.
Totalitaire jusqu’au bout des ongles, Allende avait donc nationalisé une bonne partie de l’industrie du pays - le secteur du cuivre étant le plus connu. Croyant dur comme fer dans les vertus présumées de la planification, il recruta le théoricien de la cybernétique Anthony Stafford Beer afin qu’il conçoive un contrôle informatique de la production : le projet Cybersin. Une image de la salle de contrôle (qu’on dirait issue d’un sous-James Bond de série Z) est visible ici. Inutile d’ajouter qu’il se trouve encore des nostalgiques marxistes pour chanter les louanges de ce programme démentiel et liberticide et pour refuser d’admettre que la planification économique soit non seulement immorale, mais une lubie de charlatan.
En réaction à la politique tyrannique d’Allende, les électeurs chiliens avaient largement voté pour la démocratie-chrétienne (menant désormais une opposition franche au gouvernement marxiste) et le centre-droit. En dépit des intimidations et fraudes électorales (parmi lesquelles la falsification de plusieurs cartes d’identité) organisées par le pouvoir, les factions marxistes ne récoltèrent que 43% des voix. Le 22 août 1973, la Chambre des députés fit voter une résolution dans laquelle elle dénonçait en détail les violations de la légalité constitutionnelle et des libertés publiques commises systématiquement par le gouvernement d’Allende - qui comportait de plus en plus de militaires à la tête de ministères importants (l’Intérieur et l’Économie, tout particulièrement). Pour rendre ce texte exécutoire, le Sénat devait le voter à la majorité des deux tiers. Or, le gouvernement y ayant placé suffisamment d’hommes-liges pour ne pas encourir ce type de risque, il s’abstint de suivre les recommandations de la résolution et préféra continuer de se vautrer dans la forfaiture.
Sans ce refus criminel de se soumettre à l’ordre légal, il n’y aurait jamais eu de coup d’État du 11 septembre 1973 - au cours duquel Allende se suicida avec une arme gracieusement offerte par Castro.
La cybertyrannie a encore frappé !
Le pouvoir communiste de Pékin a fait
fermer un site contestataire, "The Century", qui appelait notamment à la libération de dissidents emprisonnés et torturés par l'abject régime.
PS : merci à
Marchange d'avoir attiré l'attention de la communauté libérale sur ce forfait supplémentaire des communistes chinois.
Pascal Salin dans "Trends-Tendances"
L’hebdomadaire économique Trends-Tendances publie cette semaine un entretien avec Pascal Salin, l’auteur du désormais classique Libéralisme.
L’un des intérêts de cette interview, très justement intitulée "Le Libéral : un anarchiste qui défend la propriété", est que Salin réfute plusieurs poncifs antilibéraux. Ainsi, il rappelle que ce n’est pas le libéralisme qui repose sur des présupposés matérialistes, mais le socialisme :
"Ce sont les marxistes et les socialistes qui s’intéressent aux richesses matérielles en prélevant des impôts, répartissant la richesse, etc. Ils oublient la dimension humaine des choses. Pour un libéral véritable, ce qui est important, c’est l’esprit humain et ce qu’il est capable de créer."
Il ridiculise également les fumeux (et très intéressés) appels au "patriotisme économique" avant de rappeler les solutions que le libéralisme peut apporter aux questions environnementales, en citant l’exemple de la forêt amazonienne :
"Le discours classique est : les méchants capitalistes la détruisent parce qu’ils sont mus par la recherche du profit. Ce qu’on oublie de signaler, c’est que cette forêt appartient à l’État brésilien et non aux capitalistes en question ! C’est l’État qui octroie des droits de concession. Résultat : les exploitants coupent et s’en vont."
Etant donné que la nature est considérée comme une propriété publique, personne n’a intérêt à l’entretenir et, en particulier, à conserver le patrimoine, conclut-il. Et l’économiste de rappeler son combat en faveur du droit de propriété des Himbas en Namibie.
Il en va de même pour les manifestations de charité et de générosité : Salin déplore que l’intervention systématique de l’État ait détruit tout sentiment altruiste.
Enfin, un rappel qui a le mérite d’être clair alors qu’il est de bon ton dans certains cénacles "libéraux" de se gausser des "droits-de-l’hommiste" : refusant l’étiquette de "réactionnaire", l’auteur précise : "Je suis beaucoup plus proche de ceux qui défendent les droits de l’homme, fussent-ils anarchisants."
En conclusion, je ne saurais trop vous inviter à vous ruer chez votre marchand de journaux pour vous y procurer ce numéro de "Trends-Tendances" !
Crimes de guerre israéliens au Liban : le rapport
Un
rapport de l'organisation "Human Rights Watch" vient de paraître. Il énumère les agressions commises au Liban par l'armée israélienne contre les civils - y compris sur les routes qu'ils empruntaient pour fuir. Vu le caractère systématique de ces attaques, il est impossible de croire sérieusement à des maladresses indépendantes de la volonté de Tsahal.
Une délivrance espérée pour les Cubains
"Le pouvoir ne m’intéresse pas. Après la victoire, je veux rentrer dans mon village et reprendre mon métier d’avocat". Prononcée en 1957 devant un journaliste du New York Times, cette déclaration de Castro illustre à merveille le caractère menteur, manipulateur et foncièrement hypocrite du personnage. De la même manière, en juin 1959, après sa prise de pouvoir, il revint sur sa promesse d’organiser des élections libres en prenant le peuple de La Havane à témoin : "Des élections, pour quoi faire ?". Faut-il rappeler que cet homme qui se présentait au départ comme un fervent anticommuniste s’était entouré de son frère Raul, membre du parti communiste cubain, et d’Ernesto Guevara, marxiste psychopathe dont l’un des premiers faits d’armes consista à faire fusiller par ses guerilleros un gamin au motif qu’il avait chipé un quignon de pain ? Rappelons au passage que Guevara, incapable ministre de l’Industrie et restaurateur de l’esclavage avec ses "dimanche de travail volontaire", sera l’un des principaux instigateurs du système concentrationnaire cubain.
L’un des derniers tyrans communistes va donc mourir dans son lit. Un de plus qui échappera à la justice terrestre. Que ce bourreau continue d’être salué comme un héros par la gauche en dit long sur la moralité de celle-ci. Pensons à cette mémorable visite du gouvernement wallon à La Havane, afin d’y dilapider l’argent du contribuable (flamand en particulier). Sans oublier les multiples voyages de Louis Michel, le "libéral progressiste" de service.
Castro a depuis longtemps fait tomber les ténèbres sur cette île ensoleillée. Pour atténuer l’oppression communiste, les laudateurs du Cuba socialiste dépeignent la dictature de Batista comme incommensurablement pire. C’est un mensonge flagrant : le Cuba de Batista était au contraire un pays développé, raisonnablement alphabétisé, où la liberté de la presse était même plutôt respectée.
Même les opposants emprisonnés étaient relativement bien traités par le gouvernement Batista. Pour preuve, les lettres que Castro écrivit de prison à son ami Luis Conte Agüero. Le futur dictateur y détaille ainsi son mode de vie : lecture des classiques marxistes, débats politiques animés avec d’autres prisonniers, travaux d’érudition au sein de la bibliothèque de la prison. Castro y prenait deux bains par jour, et son régime alimentaire était tellement enviable qu’il précisa : "J’ai l’impression d’être sur la plage ; et après, j’ai même droit à un petit restaurant. Ils vont me faire croire que je suis en vacances ! Que dirait Karl Marx d’un révolutionnaire de ce genre ?" Je précise que ces lettres ont été écrites entre 1953 et 1955 - vous aurez noté la référence précoce à l’idéologue communiste... Question à deux cents : quel opposant au régime castriste a connu pareil traitement ?
Les prisons cubaines constituent un véritable système concentrationnaire, où les matons se promènent parfois avec de redoutables berges allemands. L’exemple le plus connu est l’UMAP (Unité militaire d’aide à la production), camp de travail où le régime expédia, à partir de 1964, les prêtres catholiques, les Témoins de Jéhovah, les homosexuels, etc. Les pénitenciers dépendant de la police politique (le GII) mêlent délibérément les détenus de droits communs et les prisonniers politiques. Pour éviter d’être violés par les premiers, les seconds en sont réduits à se couvrir d’excréments. Les cellules sont minuscules et bouillantes comme des étuves, à telle enseigne qu’elles ont été surnommées "tostadoras" (grille-pains). Les prisons les plus impitoyables comportent des "conseils de travail des prisonniers", où des détenus se comportent comme des kapos avec leurs compagnons de cellule. Depuis quelques années, la torture psychologique (privation de sommeil, nudité complète des prisonniers, ingestion de produits chimiques pour les faire parler, etc.) est préférée à la trop visible torture physique. Dans les prisons pour femmes, les exactions des gardiens sur les détenues sont la règle. Les personnes qui sont parfois libérées sont évidemment détruites pour le reste de leurs jours.
Dès 1959-1960, Castro créa sa gestapo, le Département de la Sécurité d’État, qui noya dans le sang les rebelles de l’Escambray (constitué d’anciens opposants à Batista passés dans la résistance au nouveau pouvoir) puis ses sections d’assaut, les Comités de Défense de la Révolution, qui surveillent dans chaque pâté de maisons les opinions, voire absence d’opinions, des habitants. Le mouchardage a été érigé en mode de vie. Pour le régime communiste cubain, tout citoyen est un ennemi potentiel.
Parmi les premières mesures "sociales" de Castro, citons la création du carnet de travail - dans lequel devaient être consignées les affectations, mutations et aptitudes de l’employé. Une disposition que la gauche s’empresse également d’omettre est l’allongement autoritaire de la durée de travail. Rappelons aussi l’instauration du service militaire obligatoire en 1963, sous prétexte de lutter contre "la fainéantise, le vagabondage, le parasitisme" - Castro s’est toujours fait une belle idée de la jeunesse ! Ce service d’une durée de trois ans suscita une forte opposition, notamment chez les Témoins de Jéhovah (qui sont, par principe, objecteurs de conscience). La répression s’abattit immédiatement et avec férocité sur les opposants.
Ensuite, le rationnement de la population sur ordre du "Mincin" (abréviation tout orwellienne du Ministère du Commerce) est aussi à ranger parmi les "hauts" faits du régime. Chaque Cubain se vit, du jour au lendemain, astreint à ne pas dépasser un certain volume de biens de consommation et à se ravitailler dans le magasin qui lui avait été assigné. Là aussi, la délation contre les "spéculateurs" (punis de mort) fut vivement encouragée par le tyran.
Il est parfois souligné que la révolution fut d’abord portée par un formidable élan populaire. Mais c’est oublier la duplicité de Castro qui, comme rappelé au début de ce billet, feignit initialement de refuser toute couleur marxiste à ses ambitions. Or, la population dut vite déchanter - et ce, bien avant que le lider maximo ne s’alignât officiellement sur l’URSS. Dès 1960, 70% de la production nationale était passée dans les mains de l’État. Les ouvriers étaient sermonnés par le nouveau pouvoir pour leur "américanisme" supposé et soupçonnés en permanence d’ "absentéisme contre-révolutionnaire". Les propriétaires d’entreprises supposées "abandonnées" étaient chassés ; il en alla de même pour les personnes mettant en location leurs biens immobiliers. Enfin, le racisme d’État fut très rapidement instauré, frappant en particulier les pratiquants de cultes afro-cubains (que le régime exhibe depuis lors comme attractions de foire devant les visiteurs de marque...)
La castrisme fut clairement, comme tous les pouvoirs bolcheviques, une révolution dirigée contre la population pour le bénéfice de quelques satrapes se piquant d’idéologie progressiste.
Maintenant que le vieux despote est en train d’avaler son extrait d’acte de naissance, que va-t-il se passer ? Pour ma part, j’espère de tout cœur que le peuple cubain en profitera pour se soulever contre le frère cadet du sinistre dictateur et recouvrer enfin la liberté. Mais seul l’avenir le dira.
Sur l’avenir cubain, je vous conseille ce billet de Lucilio paru en juin dernier.
UPDATE : avec un peu de retard, je signale cette analyse signée Jacobo Machover (auteur de Cuba, totalitarisme tropical), parue dans Le Figaro du 3 août.
Mensonges et lâcheté
Contredisant les déclarations précédentes du gouvernement israélien, le journal Haaretz relaie des doutes grandissants sur les tirs de rockets à partir du village-martyr de Qana.
De son côté, la Croix Rouge dément même que le Hezbollah fût même présent sur ces lieux.
Quand bien même y aurait-il eu des membres du groupe terroriste à Qana, rien ne justifiait le massacre de civils. Quelle est la supériorité morale d’un gouvernement qui rejette toute responsabilité sur ses ennemis (lesquels ne valent guère mieux, puisque ceux-ci visent les civils d’en face), alors que c’est sur ses ordres que l’armée assassine des innocents ? C’est de la lâcheté au carré.
L'Empire absurde
"La Constitution des Etats-Unis est restée pratiquement inchangée et contient exactement les mêmes mots qu'au jour de sa rédaction ; pourtant, ces mots qui, autrefois, contraignaient les hommes politiques à faire preuve de modération et d'intégrité ont été transformés en pâte à modeler. Le gouvernement, qui ne pouvait autrefois ni lever d'impôts, ni engager de dépenses, ni imposer de lois, peut aujourd'hui faire tout ce que bon lui semble. L'exécutif dispose de tout le pouvoir nécessaire pour faire pratiquement tout ce qu'il désire. Le Congrès ne souffle mot, tel un naïf faire-valoir, exigeant seulement que les faveurs soient partagées. Le système dans son ensemble fonctionne si bien qu'un membre du Congrès ne risque d'être contraint à démissionner de son mandat que si l'on trouve dans son lit 'un garçon vivant ou une fille morte'."
Voici l’un des morceaux de bravoure d’un livre-événement paru il y a quelques semaines : L’Empire des dettes. Ses deux auteurs, William Bonner et Addison Wiggin sont des analystes financiers réputés et de fins décrypteurs de l’économie américaine, ainsi que le démontre cet ouvrage décapant.
Pour les deux auteurs, il ne fait aucun doute que les États-Unis sont au bord d’une crise dévastatrice, la seule question est de savoir quand elle se produira. Les raisons de cette crise annoncée sont les suivantes : les USA ont lentement mais sûrement abandonné les vieux principes jeffersoniens d’une république frugale et à la politique modeste pour glisser vers la construction d’un ordre impérial d’un genre nouveau. En effet, contrairement aux empires précédents, qui finançaient leur mode de vie somptuaire en levant un impôt sur les pays conquis et asservis, les États-Unis vivent à crédit et empruntent sans répit pour payer les intérêts de leurs dettes accumulées par une consommation effrénée. Le mythe selon lequel on s’enrichit en dépensant sans compter est devenu la doxa en vigueur outre-Atlantique, tant du côté du gouvernement que dans l’esprit d’une majorité d’Américains.
Naturellement, de même que l’empire romain n’est pas apparu ex nihilo, la transformation de la république américaine en gouvernement impérial ne s’est pas produite en un jour. Si, aujourd’hui, il est devenu quasiment impossible d’aborder en rue ou au cours d’une baignade le locataire de la Maison Blanche - alors qu’il y a deux siècles, c’était monnaie courante - et que chacun de ses déplacements à l’étranger entraîne dans son sillage des centaines d’attachés, fonctionnaires, et agents de services secrets, c’est la conséquence d’une série de fautes imputables à de nombreux dirigeants. Bonner et Wiggin relèvent d’ailleurs que ce sont les présidents les plus populaires qui ont entraîné l’Amérique dans la spirale dépensière et inflationniste.
Ainsi, Lincoln a trahi la Constitution, violé l'habeas corpus, instauré une tyrannie brutale et causé la mort de 618 000 de ses compatriotes (pour avoir un ordre de grandeur, ce nombre est équivalent à 5 millions d’Américains en 2006). Si son but avait réellement été de supprimer l’esclavage, il aurait pu le faire sans violence comme dans de nombreux autres pays qui l’avaient déjà aboli, notent les deux compères.
Ensuite, au début du XXe siècle, Wilson voulut rendre le monde "sûr pour la démocratie" en combattant les "régimes despotiques d’Europe centrale" pour remodeler l’Europe selon ses lumières ("les nations qui se gouvernent elles-mêmes n’envoient pas d’espions chez leurs voisins" disait-il, sans aucunement anticiper la création de la CIA trente ans plus tard). Pour Bonner et Wiggin, il ne fait aucun doute que c’est lui qui a accéléré le processus impérialiste :
"Woodrow Wilson était un politicien de la pire espèce : il ne mentait jamais et il était incorruptible. Il était tellement plein de bonnes intentions qu’il aurait pu pratiquement paver à lui seul la route de l’enfer.
(...)
Nous ne l’accablons pas. Ni ne le tenons pour le seul responsable. Son protégé du ministère de la Marine, Franklin Roosevelt, était son complice dévoué. Lyndon Johnson conduisait la voiture qui leur a permis de prendre la fuite. Ronald, Alan Greenspan et George W. Bush sont par la suite entrés dans le gang. Mais c’était Wilson le cerveau. C’est lui qui décida d’ "améliorer" le système de gouvernement américain. C’est lui aussi qui décida de rendre le monde meilleur. Il considérait apparemment toutes les générations d’Américains l’ayant précédé - ainsi que tous les peuples du monde hors des frontières américaines - comme une bande de cornichons. À lui et à lui seul était échu le don de voir les besoins du monde entier. Et il entreprit donc de modifier radicalement la Constitution américaine et de réorganiser le système de relations internationales qui résultait de plusieurs milliers d’années d’évolution.
"
Puis, après un intermède de quelques présidents moins idéalistes et donc plus sages, vint Roosevelt. Si, durant sa campagne électorale, il avait vivement condamné la politique budgétaire dépensière de Hoover, une fois devenu président, il se chargea d’étendre encore plus les rets de l’Etat central sur la vie de ses concitoyens. Du 9 mars au 16 juin 1933, il fit passer diverses législations portant aussi bien sur la vente d’alcool que la distribution d’aides sociales, la création de camps de travail pour la jeunesse, le contrôle des banques, etc. Ces mesures étaient présentées à la population comme provisoires. Et pourtant, en 2004, le registre fédéral comprenait 75 676 pages de lois et réglementations diverses ! Rien qu’en 2004, 4 101 règlements furent édictés. Leur coût est évidemment élevé, mais reste difficilement évaluable. Bonner et Wiggin parlent cependant de centaines de milliards de dollars... par an !
Mais l’étatisation américaine n’aurait, du reste, pas connu un essor aussi fulgurant si, vingt ans auparavant, l’impôt sur le revenu n’avait été promulgué à la suite d’un coup de force constitutionnel et si le gouvernement n’avait décidé (après avoir consulté les présidents des principales banques américaines) de centraliser la monnaie en créant la Réserve fédérale (la célèbre "Fed").
Un tournant décisif fut pris par Richard Nixon lorsque, le 15 août 1971, il décida de supprimer la parité du dollar avec l’or. Comme l’écrivent avec esprit nos deux analystes : "Quand on mentionne le nom de ce défunt président, la plupart des gens se souviennent du crime auquel il est souvent associé : l’effraction du Watergate. Mais, pendant que les maladresses des acolytes de Nixon distrayaient l’attention du public, une autre équipe de gorilles du président faisaient le casse du siècle."
Cette décision s’insérait dans un paquet de mesures dirigistes telles que le gel des salaires, la mise sur pied d’un Conseil du coût de la vie, ou la création d’un ministère de l’Environnement. Pourquoi cette fermeture du guichet de l’or ? Parce que l’or est moins réceptif à la démagogie politicienne et qu’il est bien moins obéissant et flexible qu’une monnaie-papier que l’on peut imprimer à volonté en vue de la distribuer à ses électeurs.
Voici encore un extrait :
"Durant ces nombreuses années depuis la création de la Federal Reserve en 1913, l’or est resté constant et immobile. Une once aujourd’hui achète à peu près le même montant de biens et services qu’une once de 1913, et environ le même montant qu’au temps de la naissance de Jésus. Mais le dollar a suivi tous les attrape-nigauds politiques - la guerre en Europe, le New Deal, la Seconde Guerre mondiale, la Guerre froide, la guerre du Vietnam, la guerre contre la pauvreté, la guerre contre l’analphabétisme, la Nouvelle Frontière, la Grande Société, la Sécurité sociale, Medicare, Medicaid, la guerre en Irak, la guerre contre la terreur. En résultat, devinez combien vaut un dollar aujourd’hui, comparé à un dollar en 1913 ? Cinq cents."
Bien entendu, Reagan est aussi épinglé pour ses extravagances budgétaires, pas seulement à des fins militaires d’ailleurs, puisqu’il accrut le budget de l’éducation de 50% ! Le vieux Ronald parlait avec des mots de vieux conservateur, mais agissait comme un révolutionnaire néoconservateur, sans égard pour le portefeuille du contribuable ni pour la limitation du pouvoir étatique. Bonner et Wiggin raillent, à ce propos, les tenants de "l’économie de l’offre", la supply-side economics. Contrairement à une idée reçue, pour ces derniers, il ne s’agissait pas de faire reculer l’État, mais de trouver à ses dépenses croissantes un mode de financement plus efficace. La courbe de Laffer, remarquent les auteurs, "illustre simplement la stratégie optimisée d’une sangsue rationnelle ; obtenir le plus possible à un niveau qui ne soit ni trop haut ni trop bas." La relance qui en résulta était purement artificielle et les gens crurent qu’ils pouvaient s’enrichir en dépensant toujours plus... sans plus rien produire !
Reagan avait vendu aux Américains l’illusion qu’ils pouvaient vivre à crédit indéfiniment, comme en témoigne le peu d’argent capitalisé par les ménages pour leurs retraites futures. L’innovation entrepreneuriale se situe en Asie, et non plus en Amérique, nous avertissent Bonner et Wiggin. Les Américains s’appauvrissent en se croyant riches ; ils achètent du matériel high-tech aux Japonais, mais sans rien leur vendre en échange !
Certes, il est toujours possible qu’ils soient enfin gagnés par plus de lucidité, mais il risque d’être trop tard.
NB : sur le blog de Pierre Bilger, vous trouverez un autre compte rendu de cet excellent essai.